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Ces start-up qui font briller la scène Tech kényane

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L'attentat terroriste de Garissa est la plus terrible épreuve subie par le Kenya depuis l'attaque du centre commercial Westgate à Nairobi en 2011. Un traumatisme qui vient rappeler que le Kenya doit, au quotidien, affronter un contexte géopolitique éprouvant alimenté par le chaos sécuritaire somalien. Mais en dépit des difficultés, les investisseurs sont de plus en plus nombreux à faire confiance au Kenya et à ses jeunes entrepreneurs.

Les start-up de la " Silicon Savannah " figurent parmi les sociétés technologiques les plus convoitées du continent africain, selon VC4Africa, la première plate-forme de mise en relation entre entrepreneurs et investisseurs africains. Si d'un côté les start-up nigérianes sont numériquement les plus nombreuses à lever des fonds en Afrique (24 levées enregistrées en 2014), en termes de flux ce sont les jeunes pousses de Nairobi qui attirent les plus gros investissements en Afrique, avec au total près de 4,7 millions de dollars injectés dans le capital des start-up kényanes, dépassant l'Afrique du Sud, dont les infrastructures sont pourtant plus puissantes.

Signe de la bonne santé de l'écosystème, hubs et start-up technologiques se multiplient depuis cinq ans au Kenya, pays précurseur sur le continent africain. Pour prendre le pouls de l'écosystème numérique dans ce pays, il est préférable de faire escale à Ngong Road, une longue avenue qui prend sa source dans le quartier des affaires de Nairobi et où plusieurs incubateurs et espaces de co-working ont élu domicile, puis de commencer par visiter le célèbre espace numérique iHub, le premier espace de collaboration technologique créé au Kenya en 2010.

En quittant iHub, il suffit de franchir un couloir pour explorer un autre grand lieu de l'innovation à Nairobi, le Nailab, un incubateur situé dans le même immeuble et qui fournit ses services aux start-up kényanes depuis 2012. Un peu plus loin sur Ngong Road, je faisais halte à Nairobi Garage, un espace de co-working qui fait également office d'accélérateur avec des dizaines de sociétés kényanes accompagnées, dont plusieurs via des prises de participation dans le capital.

Puissants vecteurs d'évangélisation au service de l'entrepreneuriat, tous ces hubs rassemblent et animent la communauté grandissante des innovateurs kényans. Avec, pour le seul cas d'iHub, la tenue d'en moyenne trois à cinq événements tech par semaine (Hackatons, Google Developers Group, sessions de mentoring, " Pitch Elevator " devant des investisseurs, etc.). Evénements qui rassemblent des dizaines de jeunes start-up. Une véritable inspiration pour les autres scènes technologiques africaines, qui émergent un peu partout depuis Lagos à Dakar, en passant par Accra ou Gaborone.

Plongée en immersion dans la scène start-up locale, en posant notre regard sur trois jeunes pousses kényanes dont les solutions figurent parmi les plus innovantes d'Afrique de l'Est.

La construction de l'écosystème du commerce en ligne en Afrique passera-t-elle par les deux-roues ? C'est le pari que la start-up de la livraison Sendy est en train de remporter à Nairobi où le nombre de piki piki (motocyclettes en swahili) est en forte progression (l'on recense déjà un million de motos dans tout le Kenya, selon Sendy). Ici, les marchandises destinées aux clients ont pris la place des individus sur le siège passager, grâce à une application mobile très soignée et d'une simplicité extrême, dont l'expérience utilisateur rappelle tout simplement Über, le nouveau champion californien du transport de passagers.

Car le marché est là. La vague du e-commerce est progressivement en train d'entraîner tous les pays africains avec l'explosion des classes moyennes. De plus en plus de start-up de la vente la ligne comme Konga, Olx ou encore Jumia et HelloFood (ces deux dernières sociétés sont soutenues par Rocket Internet, le " Venture Builder " allemand aux poches profondes) se constituent pour structurer un marché où les obstacles logistiques, infiniment plus compliqués qu'en Europe, ne tarissent pas.

En Afrique, réaliser un achat en ligne ne va pas de soi dans des sociétés où la bancarisation reste faible et où la méfiance vis-à-vis du paiement sur Internet demeure vive. D'où la popularité en Afrique de la méthode du " Cash on Delivery " (paiement en cash à la livraison). Autre goulot d'étranglement logistique, le manque d'infrastructures physiques, avec par exemple l'inexistence de plans d'adressage dans des quartiers entiers. De quoi transformer chaque livraison de colis en mini-parcours du combattant. Viennent ensuite la congestion automobile chronique et l'état des routes. Chaque moto est équipée d'un traceur GPS, le client reçoit un SMS lorsque le livreur entre dans un périmètre de 50 mètres autour du lieu de la livraison. Un second SMS sera envoyé au moment de la livraison physique, pour valider la transaction, dont Sendy empoche entre 10 % et 15 %.

En plus de promouvoir le " fait-main " kényan, la start-up kényane Soko Shop poursuit un rêve en fusionnant mode et innovation. Celui de faire des dizaines de milliers d'artisans traditionnels masai, somali, kikuyu ou turkana de nouveaux entrepreneurs 2.0 qui maîtriseraient tous les secrets du e-commerce. En somme, de bâtir le premier " Etsy " de l'Afrique de l'Est, mais avec une proposition de valeur différente et collant mieux aux réalités africaines. Car la jeune pousse s'adresse aux artisans kényans (en particulier les femmes) numériquement isolées et non connectées à Internet mais qui possèdent un téléphone portable. Pour cela, Soko Shop a développé une technologie qui permet aux artisans de créer leur e-boutique sur une plate-forme de vente en ligne, et cela uniquement avec des SMS.

Depuis son petit village sans électricité situé dans la vallée du Rift ou au pied des montagnes Ngong, la bijoutière traditionnelle kényane va pouvoir mettre en ligne avec son mobile les photos de ses créations travaillées à la main (bracelets, boucles d'oreilles, colliers), mettre à jour les prix, enregistrer des ventes, être rémunéré en retour. Le téléphone mobile devient dès lors un outil de facilitation qui permet aux communautés isolées de réaliser directement leurs ventes (le vendeur ne dépend plus de " middlemen " pour entrer sur le marché et percevoir le fruit de ses ventes, ce qui dope les profits), en touchant directement une clientèle internationale à fort pouvoir d'achat et friande d'accessoires de mode introuvable ailleurs. La plate-forme mise en place par Soko Shop, qui certifie et labellise chacun des artisans, gère toute la partie logistique et livraison. En 2013, Soko Shop revendiquait déjà 250 artisans sur sa plate-forme. En avril 2015, la start-up de Nairobi annonçait sur sa page Facebook que l'accès au marché international a permis à ses artisans traditionnels d'améliorer leurs revenues de près de 400 %.

Pour une start-up en provenance d'un pays émergent, intégrer " 500 start-up ", le prestigieux accélérateur californien fondé par Dave McClure, représente l'une des plus belles cartes de visite pour chasser les investisseurs de la Silicon Valley et se faire courtiser par les médias spécialisés. Un " Story Telling " de rêve, dont seulement deux start-up africaines peuvent se prévaloir en 2015. Tout d'abord la start-up ghanéenne Dropifi que j'évoquais dans une précédente chronique il y a quelques mois après mon passage à Accra. Et la start-up kényane CardPlanet, une jeune pousse de la " Fintech " qui a fait ses classes dans les premières promotions de l'incubateur Nailab, sur Ngong Road à Nairobi. Au pays de M-Pesa et du paiement mobile, la digitalisation financière de l'économie s'accélère à coup d'innovations successives, avec en filigrane l'émergence d'une société dite " Cashless " au Kenya.

CardPlanet propose, par exemple, le service CampoCard qui permet aux étudiants fréquentant les campus de Nairobi d'utiliser leurs cartes d'étudiants comme moyen de paiement à l'université : achat de livres, paiement de divers frais de scolarité, restauration... PesaCard est une autre carte proposée par CardPlanet et qui permet aux petits écoliers kényans de recevoir l'argent de poche envoyé par la famille et les proches. En levant 100 000 dollars auprès de l'accélérateur " 500 start-up ", CardPlanet poursuit l'objectif de passer à l'échelle (de " scaler " comme on dit dans le jargon des CEO de l'Internet) et de couvrir la totalité des universités et écoles du Kenya, en recrutant davantage d'ingénieurs à Nairobi pour améliorer les gammes de produits disponibles. La start-up veut aussi doper aussi la croissance de sa base utilisateur en mettant en place nouveaux leviers d'acquisition clients, via des techniques de Growth Hacking apprises dans la Silicon Valley.

Samir Abdelkrim, entrepreneur et consultant, fondateur de StartupBRICS.com, un blog spécialisé sur l'innovation dans les pays émergents, il est également chroniqueur Tech pour " Le Monde Afrique ". Depuis un an, il évolue au cœur des écosystèmes start-up et tech en Afrique avec le projet #TECHAfrique, avec une dizaine de pays déjà explorés et des centaines d'entrepreneurs rencontrés.



Source : www.lemonde.fr


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