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C'est mon histoire : " J'ai créé ma ferme en Afrique "

  Culture & Loisirs, #

Le bonheur serait-il dans la brousse ? Pas de doute pour Véronique qui a laissé tomber son avenir tout tracé pour monter une ferme au Burkina Faso, avec son copain, Antoine.

Ce matin, au réveil, j'ai failli marcher sur un cobra. Antoine, mon compagnon, a tenté de le tuer avec sa machette, mais le serpent a filé hors de la case et nous ne l'avons pas revu. Ça ne m'a pas empêchée de prendre tranquillement mon petit déjeuner sous la paillote qui ombrage notre terrasse, en contemplant notre terrain aménagé dans la brousse. Depuis que nous nous sommes installés ici, à une heure de Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, je savoure le bonheur d'être là, en harmonie avec la nature. Du moins, j'essaie de savourer. Car ce n'est pas facile tous les jours.

Un père aventurier

Quand j'étais enfant, je rêvais de manger les fruits et les légumes de mon jardin. Mais je n'aurais jamais imaginé vivre un jour dans une ferme isolée au coeur de la savane. En France, j'ai grandi dans une petite ville du Sud-Ouest. Je n'avais pas de contacts particuliers avec la nature, mes parents ne sont pas cultivateurs et personne ne m'a initiée à l'agriculture. Mais je m'intéressais aux plantes, j'aimais les cours de sciences naturelles. Quand j'ai obtenu mon bac scientifique, je me suis inscrite à la fac, en pharmacie. J'entendais dire que c'était un cursus long et difficile, mais ça ne m'impressionnait pas, je n'avais jamais eu de difficultés à l'école. Et c'était l'assurance d'avoir un travail rémunérateur. Seulement, je n'avais pas prévu que je m'ennuierais autant à l'université. Je me forçais à aller en cours, mais j'ai vite perdu toute motivation. Au point que j'ai décidé de prendre une année sabbatique après ma troisième année, pour faire le point. J'avais besoin de respirer, mais je ne savais pas encore ce que j'allais faire de ce temps libre. Voyager ? D'accord, mais où ? Mes parents s'étaient séparés quelques années plus tôt. Mon père, qui a toujours été un peu aventurier, venait de s'installer à Ouagadougou, où il avait monté un restaurant. Il était revenu quelques semaines en France pour y acheter deux Mercedes qu'il prévoyait de ramener au Burkina et cherchait justement quelqu'un pour conduire la seconde voiture. Sans réfléchir une seconde, j'ai proposé de l'accompagner. Nous ne nous étions pas beaucoup vus ces dernières années et ça me faisait changer d'air. C'est comme ça que, vingt jours plus tard, au terme d'un périple à travers l'Espagne, le Maroc, la Mauritanie et le Mali, mon père et moi étions devenus proches comme jamais... et que je me suis retrouvée dans une capitale africaine bouillonnante.

Le dépaysement était total, je rencontrais plein de gens sympas, mais je ne savais toujours pas ce que j'allais faire l'année suivante. Antoine, mon copain, est venu me rejoindre pour trois semaines et nous avons voyagé autour de Ouagadougou pour fuir le tohu-bohu de la ville. Parfois, nous parlions de rester vivre dans ce pays qui nous enchantait, de monter une ferme écologique, avec des cultures maraîchères et quelques animaux, mais je n'y croyais pas vraiment. Un soir, mon père nous a présentés à un de ses bons amis burkinabé, un type qui était investi dans mille projets culturels, dans des associations d'artisanat local, etc. Quand nous lui avons parlé de notre projet, il a réagi de manière enthousiaste : " J'ai hérité d'un terrain au sud de Ouagadougou, mais je n'ai pas le temps de m'en occuper. Si vous voulez, je vous le prête. "

Une longue piste cahoteuse

Intrigués par cette proposition, nous sommes allés voir le lieu. L'ami de mon père nous a emmenés sur une longue piste cahoteuse. Au bout d'une petite heure de route, quand il a coupé le contact en disant " Voilà, c'est ici ", nous n'avons vu que la brousse, des herbes jaunes, des fourrés secs, quelques baobabs par-ci, par-là... et d'autres arbres dont nous ne connaissions pas les noms. C'était la saison sèche, la terre était dure comme de la pierre. Le plus proche voisin vivait à deux kilomètres. Malgré ça, nous étions super enthousiastes ! Nous ne nous rendions pas compte de ce qui nous attendait. Antoine a tout de même demandé si c'était envisageable de cultiver ce terrain de deux hectares. " Oui, c'est possible. Mais je vous préviens, il va y avoir du boulot. " Effectivement. Une fois signé un contrat de prêt pour dix ans, nous avons passé plusieurs jours à débroussailler, avant d'envisager de commencer à construire notre case. Nous voulions monter une maison en bois, mais ce n'était pas possible à cause des termites qui sont très voraces ici. Nous avons opté pour des murs en ciment. Nous vivions alors à Ouaga et nous n'avions qu'une moto comme moyen de transport. C'est sur cette moto que nous avons transporté nos sacs de ciment et les outils dont nous avions besoin. Antoine faisait parfois plusieurs allers-retours dans la journée. Nous avons travaillé douze heures par jour pendant six mois avant de pouvoir nous installer. Nous avons dû creuser un puits. Il n'y a pas d'électricité : nous nous contentons d'un petit panneau solaire pour alimenter nos deux ampoules et les chargeurs de nos téléphones portables et de notre ordinateur. Nous n'avons pas de frigo, mais deux grandes jarres en terre qui conservent miraculeusement la fraîcheur, et nous cuisinons au gaz. Pendant les premiers mois, nous nous sommes nourris de pâtes et de riz, mais dorénavant nous pouvons savourer les produits du jardin et les œufs de notre poulailler. Nous élevons vingt poules pondeuses et nous avons actuellement vingt petits cochons qui gambadent dans nos trois grands enclos. Côté potager, nous cultivons des tomates, des courgettes, des aubergines, des courges, du melon, des pastèques... Nous avons également quelques manguiers et nous allons installer des ruches. Notre objectif, c'est d'arriver à remplir vingt paniers bios hebdomadaires que nous irons vendre à Ouagadougou le dimanche matin. Nous commençons à dégager un revenu avec nos premières cueillettes et nous avons une clientèle régulière.

Au pied du baobab

Sans rien connaître à l'agriculture, avec très peu d'investissement, nous avons monté notre ferme écologique. Nous avons tout appris dans les livres, mais aussi avec l'expérience. Les paysans des alentours ont commencé par nous prendre pour des fous ; maintenant, ils viennent nous demander combien nous vendons nos cochons. Mais ça a été dur de mener à bien cette aventure, et ça l'est encore. Nous travaillons tous les jours dès le lever du soleil, nous passons notamment beaucoup de temps à arroser les cultures. Nous avons attrapé le paludisme et d'autres fièvres et nous ne voyons pas grand monde. Bien sûr, il faut toujours faire attention aux petites bêtes de la brousse, araignées, scorpions, sans parler des serpents qui viennent jusque dans notre case... Parfois j'en ai assez, je me demande ce que je fais là, à trimer sous le cagnard. Quand j'ai un coup de blues, je pars m'asseoir au pied du baobab, au fond du jardin, je regarde le soleil se coucher sur la savane et tout s'apaise, presque par magie. Je réalise alors la chance que j'ai et je me sens mieux quand je regagne notre case. En faisant toujours attention où je mets les pieds. Je ne voudrais pas que cette aventure s'arrête à cause d'une morsure de serpent.



Source : www.elle.fr


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