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Des cités américaines happées par une hausse de la criminalité

  Société, #

Après deux décennies de baisse, le spectre des années 1990 fait peur. Les experts refusent d'y voir un "effet Ferguson"

Les chiffres semblent parler d'eux-mêmes. En un an, le nombre de meurtres dans plusieurs villes des Etats-Unis a connu une augmentation inquiétante. A Baltimore et à Washington, il a augmenté de plus de 30% en un an. A Chicago, les meurtres ont connu une progression de 19% et les fusillades de 21% pour la première moitié de 2015. Une trentaine de villes, dont Milwaukee dans le Wisconsin, La Nouvelle-Orléans, Saint-Louis ou encore Houston dressent le même constat. Sont particulièrement touchés par l'accès de violence qui sévit en milieu urbain les Afro-Américains et les Hispaniques.

Phénomène temporaire ou tendance lourde appelée à durer? Les statistiques sont trop récentes pour tirer des conclusions définitives, mais elles ont alerté les autorités. Des policiers de quelque 70 villes américaines se sont réunis en urgence au mois d'août pour en débattre. Ce mois-ci, le Département américain de la justice organise une conférence consacrée au sujet. Depuis les années 1980, où la criminalité avait explosé dans les villes américaines avec l'avènement du crack, le déclin de la criminalité a été spectaculaire.

A Baltimore, où des émeutes violentes ont éclaté ce printemps après la mort de Freddie Gray, un Afro-Américain dont la colonne vertébrale fut sectionnée au cours de son arrestation, plus de 215 personnes ont été tuées au cours du premier semestre. C'est près de 80 de plus qu'au cours de l'année précédente. Le cas de cette ville portuaire du Maryland est cependant spécifique. Dans certains quartiers, une proportion importante de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté. La méfiance envers la police est très marquée. Le chômage frappe de plein fouet, en particulier les jeunes Afro-Américains. Baltimore est aussi le théâtre d'une guerre des gangs et des trafiquants de drogue. L'accès facile aux armes à feu est un facteur aggravant. A Milwaukee, dans un Etat qui applique des lois très lâches en la matière, l'usage d'une arme à feu est perçu comme un moyen de se faire respecter.

Pour expliquer ce retournement de tendance, certains ont d'emblée voulu y voir "l'effet Ferguson". Depuis l'affaire Michael Brown, ce jeune Afro-Américain non armé qui fut abattu dans des circonstances encore troubles en août 2014 par un policier blanc dans la banlieue de Saint-Louis, dans le Missouri, la thèse défendue par divers syndicats de police est simple. Après cet incident qui a provoqué de graves émeutes raciales à Ferguson, la police n'oserait plus intervenir de peur de se faire traîner devant la justice. Ancien chef de la police de New York sous le règne de l'ex-maire Michael Bloomberg, Ray Kelly publie ces jours un livre: Vigilance: My Life Serving America and Protecting Its Empire City. A ses yeux, l'effet Ferguson et la réticence des policiers à intervenir serait la cause première de la hausse des meurtres. C'est la raison pour laquelle il critique vertement l'actuel maire de New York Bill de Blasio qui a limité le recours au stop-and-frisk, cette procédure de fouille systématique de citoyens jugés suspects. Restant l'une des villes les plus sûres du pays, New York a vu le nombre d'homicides augmenter légèrement.

Vice-directeur du Département de sociologie et de criminologie de la PennState University, Jeffery Ulmer ne croit pas à l'effet Ferguson. "La région de Saint-Louis a connu une hausse du nombre de meurtres en mars et avril 2014, plusieurs mois avant la mort de Michael Brown. Et puis trois mois plus tard, leur nombre diminuait à nouveau. J'ai de la peine à croire qu'à travers le pays, des policiers refuseraient d'agir après la tragédie de Ferguson. Ce qui explique les fluctuations du nombre de meurtres est davantage lié à des questions structurelles touchant à la pauvreté et à l'explosion des inégalités, au chômage et à la désorganisation sociale. La démographie joue aussi un rôle. Le taux de criminalité est souvent plus élevé dans les quartiers où il y a une plus grande proportion de jeunes entre 15 et 24 ans."

Dennis Kenney, professeur au John Jay College of Criminal Justice à New York, relève que si la criminalité a augmenté dans une trentaine de villes, elle a diminué dans bien d'autres, à Philadelphie par exemple. A Los Angeles, les meurtres ont baissé de 2,4%, même si les actes de violence ont augmenté de 20%. Difficile dès lors d'avoir une explication définitive du phénomène. Pour Dennis Kenney, ancien officier de police qui était actif en Floride avant de devenir un universitaire, la doctrine policière explique aussi certains comportements dans des quartiers difficiles. "L'attitude de la police ne doit pas consister à être très agressif ou à ne rien faire du tout. Il y a toute une gamme d'actions possibles entre les deux." Pour lui, "les Etats-Unis sont sur pied de guerre depuis des années. La police s'en est malheureusement inspirée et s'est militarisée. Elle n'apparaît parfois plus comme une force au service du public, mais comme une force d'occupation. Maintenant, elle est contrainte de tempérer son action. J'espère qu'elle saura revenir à l'esprit de collaboration avec la société civile qui a permis de réduire substantiellement la criminalité au cours de ces deux dernières décennies."



Source : www.letemps.ch


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jordan
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