Des ordinateurs, des téléphones portables et même... des pagnes contrefaits : à Cotonou, sur les étals de Dantokpa, le plus grand marché à ciel ouvert de l'Afrique de l'Ouest, on trouve de tout. Mais surtout des produits chinois.

Preuve qu'au Bénin, où François Hollande est arrivé mercredi soir pour une mini tournée africaine de trois jours, la diplomatie économique du président a fort à faire face à la concurrence. Comme partout en Afrique d'ailleurs. Le chef de l'Etat est attendu cet après-midi en Angola, le gros morceau de cette tournée à vocation économique. Hollande est accompagné d'une vingtaine de patrons. De la PME aux stars du CAC 40 comme Lafarge ou Total, dont les diplomates disent qu'elle est " la véritable ambassade de France " dans le pays, deuxième producteur pétrolier du continent noir.

Assis sur un tas d'or, le " petit Qatar africain " a déjà annoncé des investissements colossaux : 10 Mds$ pour la construction de 1,5 million de logements sociaux, 15 milliards pour la production d'électricité... " Ils sont demandeurs de tout, ça peut être l'eldorado pour les PME et les grandes entreprises ", soutient un patron de la délégation qui espère négocier un contrat.

"La France peut gagner au moins 200 000 emplois dans les cinq prochaines années"

A condition, toutefois, d'y mettre les formes. C'est le travail d'apaisement qu'est venu faire le chef de l'Etat auprès d'un pays brouillé avec la France pendant près de vingt ans pour cause d'Angolagate, un scandale de ventes d'armes au gouvernement de José Eduardo Dos Santos sur fond de Françafrique. Et demain matin, le chef de l'Etat, lâché au dernier moment par son ministre des Finances, Michel Sapin, contraint de rester à Paris du fait de la crise grecque, jouera seul le VRP lors d'un forum économique avec 90 patrons.

Les consignes ont été données par Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères : les ambassades ont " un devoir d'alerte " systématique auprès des autorités locales quand les intérêts d'entreprises françaises déjà implantées sont menacés. " Ce sont les ambassadeurs qui prennent mes rendez-vous ", sourit d'ailleurs un chef d'entreprise. Car si l'Afrique des migrants qui fuient la misère pour tenter leur chance en Europe existe bien, Hollande vise l'Afrique de la croissance, tout aussi réelle.

Dans un rapport sur un nouveau partenariat remis en décembre 2013 à Pierre Moscovici, alors ministre de l'Economie, Hubert Védrine, l'ex-patron du Quai d'Orsay, l'assurait : " La France peut gagner au moins 200 000 emplois dans les cinq prochaines années. " Comment ? " En doublant le montant de ses exportations vers l'Afrique. " La croissance économique du continent est depuis plus d'une décennie de 5 % par an en moyenne. Mais depuis 2000, la France perd des parts de marché. Les zems, les motos-taxis qui circulent à Cotonou ? Chinoises. Les nouvelles routes en Angola ? Brésiliennes. " La France passe du statut de partenaire spécial du fait des liens hérités de la colonisation à celui de partenaire comme les autres ", note l'Institut français des relations internationales dans une récente étude. Mais tout n'est pas perdu, car à l'occasion de son passage en Angola, Hollande assistera à la signature de contrats dont devraient bénéficier Total et le groupe hôtelier Accor.