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Obama est rattrapé par la question raciale

  Politique, #

Voitures brûlées, magasins pillés, affrontements avec la police. Lundi, la ville de Baltimore s'est embrasée après l'enterrement de Freddie Gray. Le 12 avril, ce jeune Noir avait été arrêté par la police pour des raisons et dans des circonstances qui restent très obscures. Blessé lors de son interpellation ou lors de son transfert au commissariat, il n'a pas survécu à une fracture des cervicales qui a sectionné sa moelle épinière. Professeur à l'Institut d'études politiques de Paris (histoire nord-américaine), spécialiste d'histoire sociale des États-Unis, particulièrement des minorités, Pap Ndiaye décrypte la situation.

 

Cette émeute à Baltimore était-elle prévisible? Que représente la ville pour les Afro-Américains? Après Ferguson, la fin de mandat de Barack Obama risque-t-elle d'être ternie par ces scandales à répétition? Pourquoi n'arrive-t-on pas à réformer la police? C'est ce qu'essayaient de faire ses responsables à Baltimore?

Depuis les événements de Ferguson [des émeutes après qu'un policier blanc a abattu un jeune Noir en août dernier], il y a un effet d'accumulation par lequel les Noirs américains protestent contre une situation locale mais aussi nationale : chaque violence exercée par la police contre un Noir s'ajoute à la précédente et paraît d'autant plus intolérable. Aujourd'hui à Baltimore, demain ailleurs, partout où la police entretient de mauvaises relations avec la population afro-américaine.

 

Pour les férus d'histoire, c'est la ville de Frederick Douglass, ancien esclave et grande figure de l'émancipation des Noirs au XIXe siècle... Pour tous les autres, c'est une ville assez typique des grandes villes américaines : désindustrialisation à partir des années 1960, " white flight " [NDLR?: population blanche qui quitte la ville vers les banlieues] qui donne une majorité noire des deux tiers à la population de Baltimore ; plus récemment, nouvelle économie high-tech autour des universités et boom touristique qui apportent des emplois mais accroissent les inégalités en laissant sur le côté la partie la plus pauvre de la population noire.

Obama est rattrapé par la question raciale, comme son prédécesseur George W. Bush par Katrina. Il s'est refusé à affronter à froid le problème très grave et très ancien des relations entre forces de l'ordre et Noirs américains. Il n'a même pas jugé bon de se déplacer à Ferguson. Obama paye aujourd'hui le prix de son éloignement stratégique du monde noir et des questions qui le préoccupent. Plus généralement, c'est la question des inégalités, au mieux stagnantes, au pire croissantes, entre Blancs et Noirs qu'Obama n'a jamais abordée de front. Ces inégalités ont une composante sociale, bien entendu, mais aussi une composante raciale spécifique qu'il faut bien aborder sans biaiser, sans avancer l'argument malhonnête du " post-racial ".

C'est un travail de longue haleine, qui ne repose pas seulement sur la composition des forces de police. Combattre le racisme institutionnel de la police américaine exige une politique nationale, un dialogue avec la population et l'abandon de la politique de répression marquée par la militarisation des forces de l'ordre et un système judiciaire impitoyable avec les minorités.

Comment se fait-il qu'on ne sache rien des conditions de la mort de Freddie Gray ? Ni même de la raison de son interpellation le 12 février... Un rapport de police a indiqué qu'il avait "fui sans être provoqué", ce qui l'avait rendu suspect... Ensuite, des vidéos montrant la police en train de le traîner par terre ont beaucoup choqué.

Le flou entretenu sur les circonstances de sa mort est très suspect. La réaction classique des autorités de police consiste à couvrir leurs hommes, au besoin en mentant effrontément. Il faut une forte pression populaire et politique pour que la police coopère et que la vérité soit établie. L'objectif des manifestants est, de ce point de vue, très clair : donner à la mort de Freddy Gray un impact national et mondial afin que les autorités ne puissent plus justifier l'injustifiable.



Source : www.ledevoir.com


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