"Nous ne sommes pas guéris du racisme". De l'aveu même de leur Président, les Américains vivent dans une société où la ségrégation et la discrimination envers les Noirs perdurent. Une semaine après la fusillade à Charleston où neuf paroissiens Afro-américains ont été tué par Dylann Roof, un suprémaciste blanc, Barack Obama avait choisi l'émission de radio "WTF with Marc Maron" pour aborder la question du racisme.

Dans une interview au ton très personnel, le président des Etats-Unis ne s'est pas perdu dans un discours politicien pour expliquer que l'absence de termes racistes dans le langage courant ne signifie pas que le racisme a disparu de la société américaine. "Il ne s'agit pas seulement de ne pas dire 'nègre' en public parce que c'est impoli, ce n'est pas à cela que l'on mesure si le racisme existe toujours ou pas", a-t-il lancé.

Les médias remplacent "Nigger" par "N-word"

"Nigger" (nègre en français), le mot a été lâché. Le gros mot pourrait-on dire. Saluée par certains, pour d'autres cette sortie a entaché la fonction présidentielle. Rapidement sur les réseaux sociaux, les réactions d'indignation se sont multipliées quand, illustration du malaise, les journaux, ont eux utilisé le terme de "N-word" pour relater l'intervention de Barack Obama lundi soir. Les télévisions ont remplacé le terme honni par un bip. Seul le site Gawker.com a bravé l'interdit implicite.

"C'est très hypocrite de reprocher cela à Barack Obama, commente pour metronews Nicole Bacharan, spécialiste des Etats-Unis. Comme le rappelle l'experte, le terme "Nigger", héritage passé de l'esclavagisme et de la ségrégation raciale, est présent partout "dans le rap, dans les films..." mais reste l'un des plus grands tabous dans les milieux médiatiques et politiques. "Aujourd'hui, le président américain a dit la vérité, a dénoncé ce faux-semblant", considère la politologue. Face à ce soulèvement collectif, Eric Schultz, l e porte-parole de la Maison-Blanche a tenté d'éteindre le feu en assurant que "dans sa mémoire", le président américain avait déjà utilisé ce terme "environ une douzaine de fois".

"Un tsunami"

Pour les Américains, "entendre Barack Obama prononcer le mot 'Nigger', c'est un tsunami", affirme de son côté Thomas Snegaroff, directeur de recherches à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), également contacté par metronews. En prononçant ce mot à dessein, "Barack Obama est enfin devenu un président noir", poursuit le chercheur, précisant que lui seul pouvait dénoncer ce tabou "sans être taxé de racisme".