Le Sodabi, un spiritueux traditionnel béninois obtenu à partir de la distillation du vin de palme se modernise. Ecce Africa: Comment est née l'idée de fabriquer le Sodabi Tambour ? Si le procédé de fabrication de la boisson était, jusque-là, resté identique à celui des origines, deux entrepreneurs occidentaux bousculent, aujourd'hui, les habitudes et se réapproprient la recette du nectar local. Quelques alambics et un emballage moderne plus tard, voilà la boisson désormais commercialisée sous la marque Sodabi Tambour Original. Une cure de jouvence qui ne manque pas de susciter des interrogations. Qui sont-ils, ces businessmen qui vendent un savoir-faire historico-culturel purement béninois et un patrimoine dans lequel tout un peuple se reconnaît ? Et surtout, qu'est-ce qu'ils font à l'alcool national? Émilie Nabet, chargée de communication de l'entreprise a accepté d'y apporter des réponses pour Ecce Africa. Vous sentez-vous investis d'une mission de modernisation du sodabi béninois ?

Émilie Nabet: Eric, l'un des cofondateurs de l'entreprise a travaillé pendant deux ans comme volontaire du Corps de la Paix au Bénin, où il a été en contact avec la boisson locale Sodabi. Lors de l'un de ses voyages en France, alors qu'il rendait visite à ses amis, il a rapporté une bouteille de sodabi à Jake [Jake Muhleman, cofondateur de Sodabi Tambour, ndlr] qui effectuait son MBA à l'EDHEC business school. Plus tard, celui-ci a eu l'idée de prendre la commercialisation du sodabi comme thème de son projet de fin d'étude. Une fois son MBA terminé, Jake et Eric ont décidé de se lancer dans cette aventure, avec la conviction que ça allait marcher. Ils ont donc tous les deux emménagé à Cotonou pour démarrer l'entreprise.

Nous avons beaucoup travaillé sur les méthodes traditionnelles de production avant de commencer notre distillation et notre mission est avant tout de partager les richesses que nous percevons dans la tradition du sodabi et en aucun cas de le dénaturer. Cependant, pour répondre aux standards internationaux, contrôler la qualité et ainsi permettre la commercialisation de notre produit, nous avons introduit dans le processus de fabrication des éléments modernes. Nos alambics, par exemple, viennent essentiellement des États-Unis et d'Europe et ont l'avantage de nous assurer une très grande précision dans la distillation. Nous avons donc, certes, un peu modifié les méthodes traditionnelles pour les rendre plus sûres et plus performantes mais toujours en essayant de garder intacte l'identité du sodabi. Ce souci de fidélité aux racines originelles du produit vient aussi du fait que nous avons été particulièrement frappés par l'histoire de cette liqueur. Le fait qu'elle soit devenue un véritable symbole d'unité pour le peuple béninois pendant la période coloniale où sa distillation était interdite.

Travaillez-vous avec d'anciens producteurs traditionnels de sodabi ?

Quels sont vos circuits de distribution et comment les Béninois accueillent-ils votre sodabi ?

Même si les éléments de l'emballage sont importés, notamment les bouteilles qui nous viennent de France, notre distillerie se trouve à Cotonou et tous nos producteurs de vin de palme sont au Bénin. Par ailleurs, nous achetons la plupart des ingrédients nécessaires à la préparation du Sodabi Tambour Original, comme le miel ou la fleur d'hibiscus, au Bénin. Nous travaillons main dans la main avec nos producteurs de vin de palme, car il s'agit bien évidemment d'éléments-clés dans le processus qualité de notre produit. En plus, nous cherchons à améliorer les méthodes d'extraction pour les rendre plus sûres ; nous y travaillons avec nos producteurs qui se trouvent à Lokossa et à Zè.

Le Sodabi Tambour Original sort-il des frontières béninoises ?

Les consommateurs béninois sont plutôt agréablement surpris par notre produit. Ils y reconnaissent évidemment le sodabi qu'ils ont l'habitude de consommer mais apprécient beaucoup la richesse des arômes et la subtilité du caractère, qui font sa particularité. Nous disposons d'un réseau de détaillants dans les grandes villes comme Cotonou, Porto-Novo et Parakou. Vous pouvez y trouver notre produit dans les principaux bars et les hôtels ainsi que dans de nombreux supermarchés. Ajoutons, à cela, le fait que nous faisons des livraisons à domicile chez des particuliers ou des entreprises à Cotonou. Nous sommes également en discussion avec de potentiels distributeurs dans le nord du pays.

Nous recherchons de potentiels distributeurs dans d'autres pays d'Afrique de l'Ouest. Nous exportons déjà au Togo, avec un certain nombre de points de vente à Lomé, et nous nous préparons pour l'exportation à destination des États-Unis avec, en particulier, le lancement du produit à New-York, très prochainement. Ceci a été facilité par le fait que le Sodabi Tambour Original a reçu une médaille d'argent au San Francisco World Spirits Competition. Il est bon de savoir que de très nombreux touristes et expatriés achètent notre produit comme souvenir de leur séjour ici, ce qui lui permet de voyager un peu partout dans le monde.