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Viol de guerre : un projet photo contre les préjugés

  Société, #

Remarquée par son travail sur les albinos au Congo, la photographe Patricia Willocq entame un projet visant à rendre toute leur dignité aux femmes qui ont subi des viols pendant les conflits armés. Pas de victimisation : une volonté d'aller de l'avant.

Légende : Esther a 30 ans. Elle est jeune maman d'une petite fille, qu'elle a acceptée et accueillie dans sa vie, née d'un viol. Dans le quotidien de la guerre, elle aimerait pouvoir compter sur les hommes, en particulier les militaires, pour la protéger, qu'elle puisse élever sa fille et lui offrir un avenir meilleur.

Cette photo a été réalisée dans la ville de Goma, en République démocratique du Congo, devant le magnifique volcan Nyiragongo. Mais elle aurait pu être prise en Bosnie-Herzégovine, au Libéria, au Bangladesh...

En 2010, l'envoyée spéciale de l'ONU pour les violences faites aux femmes et aux enfants dans les conflits, Margot Wallström, a qualifié la RDC de " capitale mondiale du viol ". Des propos jugés inappropriés pour la photographe Patricia Willocq, qui est née et a grandi au Congo. Pour cette jeune femme engagée :

" Une telle appellation ne fait que renforcer les stéréotypes et préjugés qui selon nous, portent atteinte à la dignité d'un pays et n'aident en rien à sa reconstruction. De plus, en qualifiant un pays de la sorte, les aides et l'attention ont tendance à se focaliser sur ce pays plus que d'autres, confrontés pourtant au même problème. "

 

Voilà plusieurs années que les Nations-Unis ont affirmé que la violence sexuelle dans les conflits devait être traitée comme un crime de guerre, et non comme un dommage collatéral malheureux de la guerre.

Durant les trois mois de génocide rwandais, par exemple, elles sont entre 100 000 et 250 000 femmes violées. Mais ces chiffres ahurissants se retrouvent dans bien d'autres conflits : guerre de Sierra Leone (60 000), Libéria (40 000), ex-Yougoslavie (60 000 entre 1992 et 1995), et 200 000 en RDC depuis 1998.

Look at me, I am beautiful

Lorsqu'elle se rend au premier sommet mondial sur ce thème, en juin 2014 à Londres, Patricia Willocq fait la rencontre de l'ONG HOLD-DRC. Cette organisation reçoit, forme et encadre les femmes qui ont été victimes de violences sexuelles et qui sont devenues mères suite aux viols. Elle reçoit en moyenne 100 jeunes femmes par session de 6 mois et encadrent leurs enfants pendant que les mamans suivent la formation.

En rencontrant cette ONG, nous avons découvert une volonté de vivre, d'élever les enfants - nés du viol- avec amour et de s'éloigner de la victimisation. Elles veulent oublier, se remarier et vivre dans une société, entourées d'hommes qui les protègent.

Pour lancer un débat sur le sujet, Patricia Willocq s'allie avec une amie, Mamie Kabongolo, très engagée dans ce combat, et l'ONG HOLD-DRC, pour lancer le projet Look at me, I'm beautiful : " C'est l'histoire d'une femme qu'on suit à travers les grandes étapes de sa vie, depuis sa naissance jusqu'à sa vieillesse en passant par sa scolarisation, son mariage, la naissance de son enfant, son travail, etc.

Les filles et les femmes jouant le rôle du personnage principal de la photo sont des filles de HOLD qui se sont portées volontaires pour faire partie du projet. Dans un souci de respect de leur vie privée et pour éviter de les exposer,nous avons changé leurs noms et mélangé leurs histoires, " explique la photographe.

Refuser les yeux de la pitié

Elle décrit l'image ci-dessus : " Sur la photo, la jeune femme a dans les bras son enfant, symbole de l'humanité qu'elle porte en elle. Le vêtement qu'elle porte est un pagne, un vêtement traditionnel des femmes au Congo.

Lors d'évènements importants, elles choisissent des pagnes très colorés et riches en motif. Cette couleur permet de contraster le fond kaki de la photo et de faire un rappel de couleur des bougainvilliers sur le bout des fusils des militaires."

Ces femmes ne sont plus des victimes parce qu'elles ont justement survécu à ces agressions. Elles aspirent à une vie normale, un avenir meilleur, elles refusent d'être regardées avec les yeux de la pitié.

Patricia Willocq poursuit : " Dans beaucoup de pays, les femmes sont rejetées après avoir été violées. Le titre, Look at me I am beautiful est un message des femmes à la société pour lui demander de les regarder et lui rappeler que, malgré ce qui leur est arrivé, elles sont toujours belles. " Comme le soulignait Céline Bardet, juriste internationale et cofondatrice de l'association We Are Not Weapons of War :

"Le viol comme arme de guerre n'a rien d'une pulsion sexuelle : c'est de la propagande. Il y a une volonté d'humilier la personne et de stigmatiser toute une communauté. C'est une outil de stratégie de destruction, qui est planifié, " rappelait-elle sur France Interen 2014.Pour Patricia, la photographe, il est préférable de parler de " survivantes" plutôt que de " victimes" :

 

Le rôle des hommes

Nous essayons de montrer une image positive des genres et d'exprimer, à travers ces images, que même si leur dignité d'hommes et de femmes a été souillée par la guerre, il n'est jamais trop tard pour reconstruire les choses, telles qu'ils aimeraient que ce soit.

Dans cette région du Congo, les viols ont été utilisés comme arme de guerre par les militaires. Leur présence sur l'image est un rappel de ces faits.

" Lorsque nous avons fait appel à eux, à notre grande surprise, ils ont non seulement été coopératifs, semblaient même comprendre notre démarche mais surtout, ils étaient fiers que leur rôle d'hommes et de militaires soit montré sous un angle positif, se souvient Patricia Willocq.

Nous leur avons expliqué qu'à travers cette image, nous voulions rappeler le vrai rôle des militaires, celui de protéger la population en particulier les femmes et les enfants. La fleur au fusil est tout simplement le symbole de la paix."

 

Patricia Willocq s'était fait remarquer par son travail photographique baptisé Blanc Ébène, sur la communauté albinos au Congo, une communauté qui prend le pas de l'intégraton, contrairement à d'autres pays comme la Tanzanie ou le Burundi, où elle reste stigmatisée.

 

Crédit du projet Look at me, I am beautiful :
Maquillage : Samantha N'sele
Coiffeur : Igor Mpiana
Photographie : Patricia Willocq Photography

franceinter.fr


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