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À l'heure où certains clament l'explosion de l'Afrique 2.0, les censures des réseaux sociaux n'ont jamais été aussi fréquentes sur le continent. Récemment, Internet a été complètement coupé au Gabon en réponse aux violentes manifestations qui ont suivi la proclamation des résultats de l'élection présidentielle en septembre dernier. Les autorités ont également installé un couvre-feu : la connexion totalement bloquée de 18 heures à 6 heures. Parallèlement, les réseaux sociaux comme Twitter, Facebook ou WhatsApp sont restés inaccessibles. Un « shutdown » inédit depuis les printemps arabes en 2011. De nombreux pays africains ont utilisé un procédé similaire cette année lors de troubles, de manifestations ou en période électorale : Ouganda, Tchad, République démocratique du Congo (RDC), Congo-Brazzaville ou encore Éthiopie. « Nous avons recensé près de 50 coupures en 2016 contre moins de 20 en 2015 », commente Deji Bryce Olukotun, directeur d'AccesNow, un collectif d'associations de défense des internautes. Avant d'ajouter : « La tendance semble se généraliser. De plus en plus d'Africains ont un accès à Internet et peuvent s'exprimer librement et organiser des événements. Ça effraie les gouvernements. »
Des raisons fallacieuses évoquéesMotifs officiels de ces blocages : des raisons sécuritaires ou des problèmes techniques sont le plus souvent évoqués par les autorités comme au Tchad ou en Zambie. Lors de l'élection présidentielle de mars dernier, le Congo-Brazzaville a déclaré vouloir « empêcher la publication illégale de résultats ». Même technique du côté de Yoweri Museveni, le chef de l'État ougandais, qui voulait faire « cesser la divulgation de mensonges » lors de sa réélection. « Les États se cachent derrière l'argument de l'ordre public », estime, dans une interview au Point Afrique, Julie Owono, responsable du bureau Afrique de l'ONG Internet sans frontières, précisant : « Il y a une violation de l'État de droit. Les gouvernements se le permettent parce que c'est Internet et qu'ils ne risquent aucune sanction. » Le 1er juillet 2016, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a pourtant adopté une résolution disposant que l'État de droit doit s'appliquer en ligne et hors ligne, et condamnant fermement les perturbations du réseau. Sans effet. Source : données Access Now et Dyn
Twitter, un média (trop) politique pour les gouvernements ?Motif officieux : empêcher la diffusion d'information politique. Plus qu'ailleurs dans le monde, les Africains n'hésitent pas à dégainer leurs smartphones pour partager des opinions politiques dans des pays où les médias traditionnels restent généralement à la solde d'hommes politiques. Souvent, le hashtag franchit les frontières virtuelles pour taguer la vie réelle. Les exemples sont nombreux : #Ethiopiaprotests, lancé par la communauté Oromos, #Civconstitution, de l'opposition ivoirienne, ou encore #ThisFlag, d'un pasteur du Zimbabwe, Evan Mawarire. Tous se sont soldés par des manifestations. Pour faire face à cet activisme 2.0, Robert Mugabe a même suggéré d'aller plus loin en créant ses propres réseaux sociaux qu'il pourrait contrôler.
Source : rapport How Africa Tweet, Portland Communication
Un prix à payerSi les chefs d'État espèrent paralyser les opinions politiques grâce à ces « shutdown », ils gèlent également une partie de leur économie, selon le dernier rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). « L'économie mondiale a perdu 2,4 milliards de dollars en raison des perturbations intentionnelles de la connexion », détaille Deji Bryce Olukotun. Le directeur d'Access Now précise que « c'est un minimum parce que l'étude ne comprend pas les paiements mobiles et les recettes fiscales perdues ». Ainsi, le Maroc, la RDC et l'Afrique du Sud sont les pays qui ont le plus perdu d'argent en 2016.
Source : Boston Consulting Group (BCG) projections for 2016
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