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Société, # |
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Est-ce encore possible de parler de différences culturelles et de "vivre ensemble" dans un climat positif? Le documentaire En quête d'identité(s), présenté au Festival international du film black de Montréal, montre que oui.
En février, en plein hiver - "Hé, il neige!" -, Élie Séonnet et Floryd Mbakata ont emmené à Montréal une classe de secondaire de la banlieue parisienne constituée de jeunes issus de l'immigration. Objectif: voir comment le Québec se "débrouille" sur la question de l'intégration, alors qu'il "paraîtrait que l'identité française est en danger", comme le dit une élève. Une (en)quête stimulante que ces Français vont mener en rencontrant notamment des acteurs associatifs, des jeunes de leur âge et l'humoriste Boucar Diouf. Métro a discuté avec les deux réalisateurs. Pourquoi avoir choisi Montréal comme destination?
Les élèves sont notamment allés à Montréal-Nord...
D'un autre côté, ils se sont sentis assez proches des jeunes de Montréal-Nord. Par exemple, sur le fait de grandir sereinement, ensemble, avec des personnes avec qui on partage des origines communes, comme les Haïtiens ici.
Floryd: J'étais là en 2008 lors de la mort de Fredy Villanueva. J'ai vu des choses qui ressemblaient aux quartiers en France, mais aussi beaucoup de différences. Justement, le sujet de la police est abordé dans votre film... Élie: Mais nos jeunes ont aussi remarqué que la société québécoise est plus stricte. Ne pas traverser la rue n'importe quand ou faire la file pour prendre le bus, c'est lourd pour eux! (Rires). Quand notre groupe était au centre-ville, il a eu un sentiment assez fort d'être surveillé par la police. Les jeunes ne sont pas partis de Montréal en se disant que tout est parfait ici. C'est nuancé. Un de vos élèves dit: "Ce n'est pas facile d'être un jeune Noir ou Arabe ici, mais [...] c'est comme s'ils n'avaient pas de problème à dire qu'ils aiment le Québec. Ils le revendiquent."
Nos jeunes ont l'impression de ne pas être Français. Ils se disent: "Moi, j'aimerais être Français, mais si vous ne voulez pas de moi, comment je vais faire?" Mais quand ils viennent dans un autre pays, ils sont vus comme Français!
Dans le documentaire, Boucar Diouf dit: "L'intégration, ça prend du temps"... Est-ce que vos jeunes ont observé une autre différence durant leur séjour?
Que répondez-vous à ceux qui diront que votre documentaire est idéaliste? Et puis, dans le contexte actuel, c'est positif de dire aux Québécois que ça se passe plutôt bien chez eux. En France, si on venait nous dire que notre pays est beau, que notre société est harmonieuse, peut-être qu'on aurait moins peur. Le débat sur le niqab est revenu ces derniers temps dans la campagne électorale fédérale canadienne. Au Québec, il y a aussi eu le débat sur une charte des valeurs lancé il y a deux ans... Floryd: Le documentaire peut aussi servir aux Québécois. Je sens qu'ici [au Québec], on commence à glisser un peu comme en France. Un conseil que je peux vous donner: éviter de faire du copier-coller avec les politiques françaises, notamment sur la laïcité. Arrêtez de suivre la France! Vous dites que vous avez été surpris de voire une grande affiche de promotion du Festival international du film black de Montréal, au cinéma Impérial... Élie: Un festival black en France serait plus confidentiel. Chez nous, les officiels diraient que les gens s'enferment entre eux. C'est la grande hypocrisie. Il y a un double discours. Ce n'est pas bien de défendre des intérêts en tant que musulman, Noir, homosexuel... parce qu'on est tous ensemble, parce qu'on est la France une et indivisible. Mais la réalité est différente. Ce n'est pas pareil d'être une femme noire musulmane et un homme blanc chrétien. Ils n'occupent pas la même place dans la société. En France, on n'arrive pas à faire face à cette réalité, on fait semblant. La parole aux jeunes
"En France, les gens qui ont des responsabilités politiques, économiques ou autres ne savent pas ce qu'est la diversité, affirme Élie Séonnet. Les jeunes de cette classe, par contre, sont des experts en la matière. Il n'y a aucune génération en France, avant eux, qui a connu aussi bien la diversité. Ils savent mieux que personne comme faire pour vivre avec des différences, comment vivre avec la religion, la culture et les habitudes de l'autre. Il y a un grand espace qui s'est créé entre les élites et les jeunes populations." "Nos jeunes et les jeunes d'ici savent très bien qu'ils sont dans le même monde, poursuit Élie Séonnet. Ils vivent loin les uns des autres, mais ils ont plein de choses en commun et plein de choses à échanger. Boucar Diouf dit une phrase dans le documentaire: "Le monde est à vous, tout vous est dû."" En quête d'identité(s), qui est en sélection officielle au 11e Festival international du film black de Montréal, sera diffusé samedi à 19h à l'Université Concordia, dans la salle D.B. Clarke.
La projection sera suivie d'une discussion en présence des deux réalisateurs et plusieurs panélistes. Le documentaire sera également diffusé à TV5, mardi prochain à 21h.
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