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Culture & Loisirs, # |
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Sawabona les ames-i, Hier soir, j'ai passé une grande partie de la soirée à méditer sur les notions des Kolinga (aimer, lier) et de Kolingana (se lier, s'aimer). C'est vraiment très profond, et il y a énormément des choses à dire. Le Lingala est une langue incroyablement riche ! Malheureusement, du fait de la colonisation mentale et spirituelle du Kongo, beaucoup de congolais disent que le Lingala est une langue pauvre et que certains mots n'existent pas en Lingala, c'est pourquoi on le mélange avec le Français. Ce qui est totalement FAUX. Aucune langue n'est pauvre ! Le lingala, à l'instar des autres langues africaines, est profondément riche, une richesse qui dépasse l’entendement. Il faut savoir qu'il existe deux formes de Lingala : le Lingala populaire parlé par les Congolais de Kinshasa, de la Diaspora et dans les grandes métropoles d'Afrique de l'Ouest qui est un mélange d'argot et de langues latines : le portugais, le français, l'anglais. Par exemple, le mot manteka pour désigner la "margarine" provient du portugais manteiga, le mot buku "livre" provient du terme anglais book etc. La deuxième forme est le Lingala classique de la ville de Makanza, sur le fleuve Kongo, dans la région d’Équateur. On l'appelle "lingala ya makasi", c'est-à-dire le lingala technique. Cependant, le parler dans une conversation à Kinshasa ou dans la Diaspora, pourrait paraître prétentieux tant l'interlocuteur, bien que lingalaphone, ne comprendrait pas. C'est avec cette deuxième forme de lingala que Bakoko (Les Anciens) philosophent et discutent de l'existence. Aussi, il est erroné de croire que certains vocabulaires sont inexistants en Lingala, ils ne les sont que dans le Lingala populaire. La particularité sinon la complexité des langues africaines provient du fait que le mot est souvent composé des plusieurs mots, autrement dit un mot renvoie toujours à plusieurs choses en même temps, plusieurs réalités, mondes, et dimensions; plusieurs sens qui, souvent, ne peuvent pas être appréhendés par tout le monde. Je me souviens que lors d'une conférence qu'il avait donné à la librairie panafricaine TAMERY, sur son ouvrage La NUBIE, les origines des peuples d'Afrique, Mbuta N'PIÉNIKOUA Marcus Boni Teiga avait signifié que le Bukoko (la tradition authentique africaine) comportait 3 niveaux de lecture/compréhensions : Le 1er niveau de compréhension qui est exotérique, public est destiné aux profanes, aux néophytes, aux intellectuels : aux enfants. On est dans le monde des formes, ce qui est visible, le monde "phénoménal." Le 2ème niveau est destiné aux Initiés. On est dans le non-forme, ce qui est invisible, le monde "nouménal". Le 3ème niveau de compréhension est accessible seulement aux sages. On est dans le monde des essences, de l'ineffable. Reparlons de Kolinga. Kolinga signifie aimer, lier, tandis que Kolingana signifie se lier, s'aimer. Parce que ce qui est haut est comme ce qui est en bas, et vice versa, tout dans le Bukoko (la tradition authentique africaine) renvoie aux phénomènes célestes et cosmiques, aux Lois qui régissent Nza ( l'univers): au Sacré. Et Bakoko (les Anciens) ont codifié cela dans nos langues. C'est un truc de ouf ! Les Ancêtres étaient trop fort. Les gens blaguent avec l'Afrique, mais l'Afrique est - Puissante. Aujourd’hui, les physiciens quantiques disent qu'au niveau subatomique, au niveau de l'infiniment petit, tout est lié, tout est interconnecté. (Voir le film Que sait-on vraiment de la réalité ?) . Tout est lié en lingala donne " Biloko nionso elingana", mais comme je le dis un plus haut Kolingana signifie également s'aimer. Donc tout est lié, signifie, selon moi, dans ma compréhension: tout dans l'univers a été crée pour se lier, s'attirer... s'aimer.
To lingana : "Aimons nous " signifie aussi "lions-nous ". Ce qui nous permet de comprendre pourquoi dans le Bukoko (la tradition authentique africaine) la communauté, la famille occupeune place aussi importante. Le Nous, le collectif, est plus important que le Je, l'individu, ainsi il n'y a pas de place pour l’individualisme et la compétition. C'est le fondement même de la philosophie Ubuntu : je suis, parce que nous sommes. Parce que nous provenons tous de la même Source, NKOLO (Celui Qui Est, Dieu), étant ses enfants, nous sommes crées pour nous lier entre nous, pour nous aimer entre-nous. Je comprends mieux pourquoi Mbuta Celestin Mukanda, un nganga ( "chamane") Kongo, me disait un jour que la tradition authentique africaine est essentiellement amour (Cf En lingala, l'amour se dit Bolingo). "L'amour, c'est beaucoup plus qu'aimer sa famille, ses amis et ses possessions, car l'amour n'est pas qu'un sentiment : l'amour est une force positive. L'amour n'est pas fragile; faible, ou chétif. L'amour est la force positive de la vie ! L'amour est à l'origine de tout ce qui est bon et positif. Il n'y a pas cent forces positives dans la vie ; il n'y en a qu'une" Rhonda Byrne, auteure australienne du célèbre Le Secret "J'ignore si l'humanité en viendra à suivre consciemment la loi de l'amour. Mais cette pensée ne devrait pas m'affecter, puisque de toute façon cette loi fonctionne à l'instar de la loi de la gravitation, qu'on l'accepte ou non." Gandhi, homme politique Pour désigner ce lien entre toute chose, Lynne Mc Taggart, une journaliste scientifique américaine parle du lien quantique.} Lynne McTaggart: Le lien quantique - Une nouvelle façon de vivre
La richesse d'une langue reflète la richesse, la grandeur d'une culture et d'un peuple. Je comprends mieux la démarche de l'acteur Forest Whitetaker. En effet, dans une interview ce dernier a déclaré :
“J’apprends les langues africaines. Je veux sentir l’Afrique dans mon âme”. "Sentir l'Afrique dans mon âme" = sentir la grandeur des mes Ancêtres. Parce que nos Ancêtres étaient grands, très très grands.
On doit se réapproprier nos langues, les perfectionner et les développer. Une langue s'appauvrit et perd son âme dès lors où les hommes et les femmes qui la parlent se désintéressent de la culture dont elle découle, de sorte qu'ils introduisent des mots étrangers -d'autres réalités, d'autres vibrations - dans leurs vocabulaires, et progressivement, génération après génération, la langue perd sa pureté, son essence ; tandis que le peuple, lui, perd ses traditions, son histoire, son âme. "Un peuple ignorant de son histoire est comme un arbre sans racines." Mbuta Marcus Garvey Les langues africaines dans leur complexité retranscrivent les phénomènes cosmiques qui régissent l'univers, que la science occidentale est entrain de découvrir peu à peu. Donc parler le Français ou une autre langue occidentale n'est pas synonyme d'intelligence ou de supériorité; et parler une langue africaine n'est pas synonyme d'ignorance ou d’infériorité. C'est vraiment très excitant que d'étudier cette langue, de découvrir toute la richesse qu'elle regorge. Voici un exemple que j’apprécie particulièrement : Nous qualifions notre planète, la terre, comme étant notre mère, notre mère nourricière car celle-ci pourvoit aux besoins de ses enfants. Elle nous procure tout ce qui est nécessaire à notre survie, une nourriture saine provenant directement de ses entrailles.
Bakoko (Les Anciens ) ont employé le même terme pour désigner la terre mais également les seins de la femme car en nourrissant l'enfant avec ceux-ci, la femme perpétue la tache de la Terre, de la Mère. "C'est pourquoi la tradition assigne à la femme-mère un rang de demi-dieu ". Je suis amoureux de ma langue, de ma culture et j'aime Bakoko ( mes Ancêtres). Il y a tellement des choses à dire sur le Bukoko (Tradition authentique africaine). Je me sens tellement fière d'être africain. I love my people.
Source : basangoyakatiopa.blogspot.fr | |||
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