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L'Ethiopie, la bonne élève de la Chinafrique

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La Chine et l'Ethiopie viennent de poser la première pierre d'une nouvelle zone économique spéciale (ZES) dans la banlieue d'Addis Abeba. Un kilomètre et demi d'usines, de bureaux et de logements qui devraient voir le jour d'ici cinq ans et, à terme, créer 50 000 emplois. Quarante-cinq entreprises devraient être installées dans ce carré de poussière à 18 kilomètres de la capitale.

Budget : 400 millions de dollars financés par la China Exim Bank, la banque chinoise d'import-export. En 2020, le parc industriel sino-éthiopien de Dong Guan sera la plus importante zone économique spéciale du pays. Depuis trois ans, la zone est occupée par un fabriquant chinois de chaussures, la société Huajian, à l'origine de ce projet de ZES.

Longtemps marqué par la famine, l'Ethiopie entretient aujourd'hui des relations privilégiées avec Pékin.

" L'Ethiopie ressemble à la Chine d'il y a trente ans ", raconte son patron, Huajian Zhang, dans un entretien à la presse locale. Cet ancien militaire de 55 ans a quitté sa province natale du Jiangxi en 2012 pour l'Afrique à l'invitation de l'ancien premier ministre Meles Zenawi. Sa principale préoccupation concerne le transport et logistique qui lui coûte quatre fois plus cher qu'en Chine. L'Ethiopie espère attirer sur ce modèle plus d'un milliard et demi de dollars d'investissements directs étrangers en 2015.

" La Chine entretient avec l'Éthiopie des relations économiques et commerciales caractéristiques de celles qu'elle développe avec l'ensemble des pays en développement dotés d'une importante population - et donc potentiellement d'un vaste marché intérieur -, d'énormes besoins en infrastructures, mais plutôt démunis en matières premières d'exportation ", explique Jean-Pierre Cabestan, directeur de recherche au CNRS et professeur à l'université baptiste de Hong Kong.

Longtemps marqué par la famine, l'Ethiopie entretient aujourd'hui des relations privilégiées avec Pékin. Le courant passe bien entre le Parti communiste chinois et le Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens, au pouvoir depuis 1991. Une longévité qui explique l'afflux de capitaux chinois rassurés par ce régime autoritaire : lignes de chemin de fer, centrales hydroélectriques, routes, modernisation de l'aéroport ou encore construction du siège de l'Union africaine à Addis Abeba. L'Exim Bank finance l'intégralité de ces projets.

" Cette combinaison de main-d'œuvre peu chère et abondante, cette pénurie d'infrastructures et d'électricité et la volonté politique d'attirer les capitaux étrangers, font de l'Ethiopie l'un des pays les plus attractifs d'Afrique pour Pékin ", commente Deborah Brautigam, professeur à l'université Johns Hopkins de Washington. L'Ethiopie est aussi un avant-poste de sa stratégie de délocalisation.

Fini en effet le temps où l'usine du monde faisait la loi sur le marché de la production à bas coût. Avec la hausse des salaires en Chine, 80 millions d'emplois pourraient être délocalisés de Chine continentale vers l'Afrique, selon des chiffres de l'économiste chinois Justin Lin, professeur à la Peking University et ancien cadre de la Banque mondiale.

Le salaire moyen en Chine est de 3469 yuans, soit 510 euros. Les salaires à l'usine Huajian en Ethiopie tournent eux autour de 28 euros, soit dix-huit fois moins ! Les 3 500 ouvriers de Huajian produisent deux millions de paires de chaussures par an. La productivité n'y est pas énorme - deux tiers en dessous des cadences chinoises -, mais l'usine gagne de l'argent depuis sa création. Entre 100 000 et 200 000 dollars par an, selon la direction.

L'installation de zones économiques spéciales en Afrique suit la même stratégie que celle définie en Chine dans les années 1980.

Huajian est aujourd'hui un cas d'étude de cette délocalisation entre économies du sud. L'Ethiopie, 96 millions d'habitants, est le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique. Elle dispose d'une population jeune mais peu éduquée et victime d'un chômage massif. 80 % de sa population travaille dans l'agriculture. Résultat : pour faire tourner son usine, Zhang a dû former chacun de ses ouvriers et de ses contremaîtres.

L'installation de zones économiques spéciales en Afrique suit la même stratégie que celle définie en Chine dans les années 1980. Des îlots de croissance où s'installent des usines étrangères bénéficiant de conditions privilégiées comme des congés fiscaux. Le delta de la rivière des perles dans le sud de la Chine est ainsi devenu en trente ans le cœur industriel de la Chine et son taux de croissance est deux fois supérieur à la moyenne nationale.

Lire aussi : Le yuan chinois, un nouveau dollar pour l'Afrique ?

On compte actuellement huit grandes zones économiques spéciales en Afrique créées et financées par la Chine : Chambishi et Lusaka en Zambie, Jinfei à Maurice, Ogun et Lekki au Nigeria, Suez en Egypte, Oriental et bientôt Dong Guan en Ethiopie.

" Ces zones économiques chinoises peuvent réussir à condition qu'elles créent suffisamment d'emplois africains, qu'elles améliorent la compétitivité des industries et, bien sûr, qu'elles attirent suffisamment d'entreprises. Si ces zones restent des enclaves chinoises et qu'elles n'assurent pas un minimum de transfert de technologies, alors elles échoueront ", conclut Deborah Brautigam.

Sébastien Le Belzic est un journaliste installé à Pékin depuis 2007, où il dirige le site Chinafrica. info, un magazine sur la " Chinafrique " et les économies émergentes.



Source : www.lemonde.fr


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