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Culture & Loisirs, # |
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Dans son dernier roman, Zadie Smith agence ses personnages pour dessiner le portrait croisé du Nord Ouest de Londres. Tout commence par un incident. Une fille paumée et fauchée qui vient mendier à la porte de Leah. Mère à l’hôpital, besoin d’aide. Une explication incohérente pour tenter de soutirer l’argent de sa came. Banale anicroche, dont Zadie Smith tire le fil ténu, y amarrant ses personnages. Leah, Keisha, Nathan, Félix. Ils ont tous grandi à Caldwell, cité fictive du Nord Ouest de Londres. Tous du quartier. Qu’ils n’ont, en fin de compte, jamais vraiment quitté.
Zadie Smith n’épargne pas ses personnages. Elle déroule sans scrupules les contradictions et les secrets inavouables. Mais elle ne leur en tient jamais rigueur, s’abstient de juger et se contente de décrire leur réalité. D’un personnage à l’autre, l’auteur modifie sa structure narrative, colle au regard de ses trentenaires de papier pour mieux retranscrire leur cruauté ou leur naïveté. Son écriture ciselée souligne les pensées qui passent, les angoisses qui persistent et l’humour grinçant des situations. La critique sociale n’est jamais loin, mais Zadie Smith est assez fine pour éviter la morale et le mélo. « Du jour au lendemain tout le monde a grandi. »Dans le Nord Ouest de Londres, Leah, Keisha, Félix ou Nathan gravitent autour de leurs souvenirs, pas très sûrs de ce qu’ils sont devenus. Ces personnages sont les passeurs des histoires du quartier, figure principale du roman. « Ici, ni crise ni croissance. La dépression est permanente. » Zadie Smith n’est pas agent immobilier, elle ne “vend“ pas son quartier. Mais elle en dresse le portrait avec tendresse et esprit, la dérision toujours liée au sérieux du détail.
A deux pas de la chronique, parfois, Zadie Smith laisse l’impression qu’elle s’éparpille. Mais l’on retrouve toujours le fil de ce roman brillamment construit. Car rien n’est inutile et tout détail a son écho.
Source: www.politis.fr | |||
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