Oubliez Paris, Londres et New York et découvrez Johannesburg, le Cap, Lagos, Accra et Nairobi. Avec leurs collections de prêt-à-porter, les jeunes créateurs africains sont aujourd'hui les vedettes des défilés de mode sur le continent. Diana Opoti, spécialiste des tendances de la mode en Afrique, nous explique l'énorme potentiel d'un secteur en pleine expansion.

Sur la nouvelle scène africaine de la mode, les projecteurs sont aujourd'hui braqués sur de jeunes créateurs locaux qui font de plus en plus parler d'eux. Leur travail est observé à la loupe par la star montante du Kenya en matière de tendances et de mode, Diana Opoti. Âgée de 30 ans, elle est la présentatrice vedette du très populaire magazine hebdomadaire Designing Africa, regardé par des dizaines de millions de spectateurs dans 47 pays (y compris récemment le Royaume-Uni). Dans son émission, Diana s'intéresse à l'actualité du monde de la mode en Afrique du Sud, au Nigéria, au Kenya et dans d'autres pays du continent. Elle donne la parole aux créateurs, stylistes, photographes, mannequins, mais aussi aux fabricants de textile, de chaussures et accessoires qui habillent de près ou de loin les nouvelles classes moyennes et aisées des capitales africaines. De plus en plus tournées vers la mode, elles ont aujourd'hui les moyens d'acheter des vêtements créés, confectionnés et vendus localement.

La nouvelle scène de la mode

Certains de meilleurs créateurs d'aujourd'hui ont des noms dont vous n'avez peut-être encore jamais entendu parler, par exemple ceux de Taibo Bacar pour le Mozambique, John Kaveke pour le Kenya, Anisa Mpungwe, Thula Sindi et David Tlale pour l'Afrique du Sud ou encore Nelly Aboagye (et sa marque Duaba Serwa) pour le Ghana. " Il y a aussi de jeunes stars montantes comme Nana Brenu de 1981, Katungulu Mwendwa et Nkhensani Nkosi ", ajoute Diana.

Si le Nigéria et le Ghana abritent certains des plus audacieux stylistes de mode du continent, l'Afrique du Sud offre un environnement économique favorable à la fabrication et à la distribution des vêtements. " Le pays bénéfice de la présence d'écoles de mode internationalement reconnues. Il promeut aussi un concept très intéressant de 'conseils de la mode' régionaux comme le Conseil de la mode du Cap dirigé par Bryan Ramkilawan. Ces conseils permettent aux stylistes des différentes régions du pays d'avoir accès aux ressources et de pouvoir présenter leurs créations ".

Les défis posés aux stylistes

L'Afrique du Sud organise des défilés de mode de prêt-à-porter et dispose de magasins affiliés et indépendants. " On compte peu d'autres pays africains avec une industrie de la mode ", explique Opoti. " Le Kenya est un réservoir de talents, mais notre industrie pose de nombreux défis aux stylistes qui essaient de commercialiser leurs produits. La confiance dans les marques locales est encore fragile et les créateurs doivent affronter la concurrence du marché de l'occasion. Seule une poignée de stylistes ont des magasins qui vendent leur marque ", souligne Opoti.

Pour améliorer leur situation, les stylistes ont besoin de s'associer à des fabricants locaux, qui restent difficiles à trouver. " C'est une industrie qui recèle un grand potentiel. Pour l'exploiter, les investisseurs devraient d'abord investir dans la production de textile, coton et autres tissus de bonne qualité. Ensuite, ouvrir une petite ou moyenne unité de production de textile au Kenya ou dans tout autre pays d'Afrique de l'Est. Ces deux actions conjuguées pourraient faire prospérer une industrie locale dans le secteur du prêt-à-porter. La production locale permettrait de vendre les produits de nos créateurs à des prix plus raisonnables. Il y a une vraie demande, comme le montrent de nombreux rapports sur la consommation des ménages. Elle est aidée par l'émergence d'une classe moyenne en Afrique qui gagne 1 000 euros par mois. Le secteur de la mode n'a donc plus qu'à attendre l'arrivée d'investisseurs désireux de tirer parti d'un marché en plein essor ".