Société |
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Acheter son sandwich comme tous les midis. Mais le payer 5 euros plutôt que 7, car sa date de péremption est sur le point d'expirer. Et contribuer ainsi à éviter le grand gaspillage alimentaire auquel nous assistons tous, impuissants. Surtout, auquel nous participons tous, inconsciemment. En quelques clics, c'est possible, grâce à Optimiam. Deux étudiants sont à l'origine de cette application mobile. Opérationnelle depuis octobre 2014, elle permet d'acheter "juste à temps" des produits qui auraient fini à la poubelle en fin de journée. On se "logue". Elle géolocalise les promos sur ce type de produits, jusqu'à 10 kilomètres autour de nous. Après avoir choisi l'offre qui nous intéresse, direction la sandwicherie. On commande, en montrant l'écran de l'application. Le commerçant nous donne un code, associé à l'établissement, qu'on tape sur notre smartphone. Et bon appétit, à prix réduit, la conscience ravie. Le déclicLe gaspillage, c'est l'un des chevaux de bataille de la ministre de l'écologie, Ségolène Royal, auprès de laquelle des acteurs de la grande distribution se sont engagés, fin août, à faire des efforts. De plus en plus, en grande surface, le prix de ces aliments sont "cassés". Même s'il ne s'agit que d'une date de péremption officielle (on peut manger des yaourts longtemps après le jour indiqué). Mais le secteur serait moins responsable du gâchis que les ménages (chaque Français jette en moyenne 20 à 30 kilos de nourriture par an), ou que la restauration. "Mon associée, Raodath Aminou, a eu l'idée dans la galerie d'un hypermarché, raconte Alexandre Bellage, cofondateur d'Optimiam. Un traiteur japonais tentait de vendre à temps des sushis en promo, criant depuis son comptoir. Elle s'est alors demandé comment connecter le commerçant au consommateur." Alexandre Bellage est familier de la thématique. Travaillant dans des boulangeries ou des restaurants, en stage ou pour un job d'été, le jeune homme se désole de tout ce qui est jeté chaque soir. Alors, lorsque l'étudiant en gestion entend l'étudiante de polytechnique expliquer son projet, "ça fait tilt". La mèche prend. Rapidement, c'est l'heure du premier test : une semaine avec une chaîne de sandwicheries implantée dans le V e arrondissement de Paris, autour de Jussieu, "un quartier universitaire. En une semaine, 45% du stock d'invendus ont été achetés par 15% du groupe de consommateurs". L'essai s'avère donc concluant. De concours gagnés en incubateurs de start-up, les deux associés montent une boîte. En octobre 2014 commence une phase pilote de trois mois. Celle-ci est plus fructueuse que prévu. " On a senti un réel besoin. Par exemple, une boulangerie parisienne jette environ 5 % de son chiffre d'affaires annuel", commente le cofondateur d'Optimiam. Aujourd'hui, environ 90 commerçants sont abonnés à l'application, où près de 30 000 personnes sont inscrites. Alexandre Bellage se félicite du succès de sa création : "Chaque semaine, la moitié de ce qui est mis en ligne est vendue. On a enregistré plus de 1 000 transactions sur neuf mois." Une démarche commerciale, pas solidaireUne réussite qui peut rassurer les commerçants. Pour être recensé par Optimiam, ils payent 400 euros l'année pour les indépendants. Jusqu'à 1 000 euros pour les supermarchés. Une dépense conséquente pour des petits établissements. "Mais l'abonnement est rentabilisé en trois ou quatre mois, assure l'étudiant. Et on observe sur huit mois jusqu'à 4 000 euros gagnés pour les enseignes." Joséphine Mbumba a ouvert une sandwicherie à paris, près la place de la République en juin. Elle a été démarchée cet été par les équipes de la start-up. "J'ai dit oui directement, se souvient la propriétaire des lieux. Ça a un coût mais je suis entièrement d'accord avec les valeurs portées par Optimiam." À savoir, pas de gâchis. C'est d'ailleurs l'argument phare d'Alexandre Bellage, lorsqu'il est confronté à des réticences : "C'est plus qu'un bon plan. La connotation sociale et environnementale du projet sert l'image des structures adhérentes. Et attire les clients, qui sont 30% à revenir." Une activité florissante, en somme, qui l'est grâce à un marketing béton. L'objectif d'Optimiam est de créer une vraie communauté. Pour se faire, tous les moyens sont bons. L'équipe récupère régulièrement de la nourriture invendue dans les commerces associés. Tout est distribué dans la rue, aux passants, sensibilisés au gaspillage alimentaire. Et bien sûr, invités à installer l'application. Pour développer ces happenings alimentaires, la start-up cherche à s'équiper d'un triporteur avec caisson frigorifié, grâce au crowdfunding. On pourrait alors imaginer une collaboration avec des associations solidaires, dont le travail en serait largement facilité. Mais se lier avec celles-ci n'est pas vraiment à l'ordre du jour. "Nous l'envisagerons peut-être un jour, affirme l'entrepreneur. Mais pour le moment, il faut se développer. Nous avons des objectifs économiques." Si Optimiam ne se décrit pas comme une démarche "solidaire", l'initiative a un effet positif. Reste à savoir si ce genre de démarche aura un impact sur les millions de tonnes de nourriture jetées chaque année en France. À lire aussi : Simone Lemon, petits plats pour grande cause À lire aussi : Gaspillage : la grande distribution fait un pas vers Royal
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