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Pathé O, le couturier ivoirien qui a séduit Mandela

  Mode & Beauté, #

"Tu vas faire quoi avec 5 poches? Tu as tant d'argent que ça ?" demande Pathé O, ironique. Assise à ses côtés, une de ses clientes fidèles commande pour son mari une chemise 5 poches pour la convention du RHDP, la cérémonie d'investiture d'Alassane Ouattara pour la prochaine élection présidentielle. Elle a apporté le pagne imprimé pour l'occasion, à l'effigie d'ADO. "Non, répond-elle, mais dans ces trucs, on te donne plein de documents, tu ne sais jamais où les mettre, tu comprends mon chéri." Pour décider de la localisation des poches, elle joint le geste à la parole. "Ici, là..." En moins de 10 minutes, l'affaire est pliée.

Le maestro est lui-même à l'oeuvre

C'est Pathé O lui-même, mètre en ruban vert autour du cou, qui prend la commande - et quand nécessaire, les mesures. Ici, dans son atelier du quartier populaire de Treichville, le couturier propose du sur-mesure et du prêt-à-porter. Des robes, des pantalons "village" comme ceux qu'il ne quitte jamais - sorte de sarouels resserrés aux mollets - et ses fameuses chemises, telle la "Mandela", qui ont fait sa notoriété. Une galerie de portraits, accrochés dans son petit salon vient le rappeler : ce Burkinabé installé à Abidjan depuis plus de 30 ans fût le couturier de Mandela, de Modibo Diarra, Koffi Olomidé, ou encore Paul Kagamé qui lui ont emboîté le pas, fiers de porter haut les couleurs du "made in Africa". Pathé O aurait pu surfer sur cette réputation, entretenir le filon, il aurait pu ouvrir une boutique à Paris - comme tant d'autres en ont rêvé la carrière parfois à peine entamée... Il a préféré rester fidèle à lui-même. Bien lui en a pris : il est aujourd'hui à la tête de l'un des plus gros ateliers de couture de la ville.

Une clientèle internationale se bouscule dans son petit salon

Sur le canapé en Skaï orange du petit salon de l'avenue 19, rue 22 barrée, les clientes se succèdent sans interruption. Ce qui frappe, c'est le mélange des genres. L'une arrive de Johannesburg, sac luxueux et siglé sur les genoux. Elle aussi a apporté son tissu, un pagne qu'elle gardait "précieusement depuis des années", explique-t-elle et veut une petite robe trois trous pour un mariage chic en Inde. Une autre, en boubou, attend sagement le maître, foulard sur la tête. À quelques mètres de là, c'est une fourmilière. La symphonie des machines à coudre bat son plein. Il y a les tailleurs, mais aussi les assembleurs, les repasseurs, en tout près d'une cinquantaine de personnes. Issiaka est en train de couper dans le tissu apporté par la première cliente. Il prend soin de ne pas abîmer le motif. "Elle sera prête dans une heure", explique-t-il. "C'est le temps qu'il nous faut pour faire une chemise." Une cliente est passée récupérer les 7 "manches courtes" qu'elle a commandées pour son mari.

Un nouveau modèle chaque semaine

C'est de l'autre côté de la rue que cela se passe, dans la boutique. Deux hommes sont occupés à regarder les nouvelles collections. Il ne se passe pas une semaine sans que Pathé O ne crée un nouveau modèle ou n'offre à ses grands classiques (les chemises Mandela, Nuage, Mouchetée ou Tableau...) un nouveau coloris. Les tissus spécialement teints pour l'atelier sont exclusifs. Ici, le premier prix est à partir de 35 000 FCFA (53 euros) pour une chemise à manches courtes, 45 000 CFA (68 euros) pour une "manche longue". La machine est bien huilée. "Pour moi, la mode, c'est avant tout économique, c'est vivre de son métier et faire vivre des gens", observe Pathé O, quand on l'interroge sur le fait qu'il participe peu à des défilés sur les grandes places de la mode, en Afrique ou à l'étranger. "Je reviens d'un show à Addis-Abeba. OK, c'est très bien, mais si je reviens ici sans avoir vendu une robe et qu'en plus les Ivoiriens n'achetaient pas mes vêtements, ça servirait à quoi ? Beaucoup de créateurs veulent être des stars en Occident avant même d'avoir consolidé leurs ateliers. Moi, je pense qu'au lieu de passer son temps à se revendiquer comme différent, le travail de fond à faire, c'est que nos compatriotes, en Afrique, s'habillent africain."

Habiller les Africains d'abord plutôt que courir les défilés

Pathé O peut se targuer d'être l'un des très rares créateurs ouest-africains à avoir plusieurs boutiques et points de vente, non seulement en Côte d'Ivoire (il en compte quatre et bientôt un cinquième, à l'hôtel Ivoire), mais aussi au Burkina Faso, au Mali, en Angola, en RDC, au Gabon, ou encore au Cameroun. Quand il évoque Mandela, Pathé O regarde sa photo face à lui - "Paix à son âme", dit-il. Il ne nie pas que "le Président" comme il l'appelle, a joué un rôle dans la médiatisation de son travail. C'est la partie visible de l'iceberg. Quand le couturier explique, en citant le leader sud-africain, qu'il ne faut pas confondre "liberté et pouvoir" - "La liberté, ce n'est pas avoir ce que les Blancs ont", on mesure la place que l'ancien président a eue dans la vie et le parcours de ce créateur ancré dans le réel.



Source : afrique.lepoint.fr


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