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Afrique - Amref : la santé au service du développement

  Société, #

 

L'Amref Flying Doctors n'est rien moins que la première ONG de santé publique en Afrique. Fondée en 1957, elle est le porte-voix de femmes et d'enfants africains qu'entre autres, Esther Madudu, sage-femme, et Sylla Thiam, médecin, s'évertuent à faire naître, mais aussi à bien ou mieux vivre y compris quand des maladies se déclarent. Le docteur Sylla Thiam est responsable du programme VIH-Malaria-Tuberculose au sein de l'Amref. Avec Esther Madudu, ils symbolisent la campagne internationale Stand up for African Mothers. De quoi s'agit-il ? Depuis 2011, cette campagne vise à former 15 000 sages-femmes africaines pour contribuer à réduire la mortalité maternelle et néonatale en Afrique subsaharienne. À la fin 2015, plus de 7 000 sages-femmes ont déjà pu bénéficier des programmes de formation de l'Amref dans 7 pays d'Afrique. Le lancement officiel de la phase II a eu lieu en octobre dernier lors d'un grand gala organisé avec le soutien notamment du gouvernement de la Principauté de Monaco, la Fondation Princesse Grace, la Fondation Sanofi Espoir et la Fondation Stavros Niarchos à Monaco. Alors qu'en 2050, les statistiques mondiales prévoient qu'un enfant sur trois naîtra en Afrique, l'Amref se tient prête à répondre efficacement en proposant des solutions africaines. Entretien croisé avec deux visages d'une Afrique nouvelle qui veut se construire sur un système de santé de qualité.

Le Point Afrique : En 2050, un enfant sur trois dans le monde naîtra en Afrique, que représente cette statistique pour l'Amref ?

Dr Sylla Thiam : Tout d'abord en 2050, l'Afrique sera l'un des continents les plus peuplés. Nous n'avons pas atteint les objectifs du millénaire pour le développement en termes de réduction de la mortalité des enfants. Le même constat d'échec est à faire sur le plan socio-économique. Car une population qui double ou triple, cela veut dire qu'il y aura plus de jeunes sur le marché du travail et plus de bouches à nourrir. Il faudra donc créer des emplois pour ces jeunes.

Que fait l'AMREF par rapport à cette réalité ?

Dr Sylla Thiam : Nous avons produit une étude sur les objectifs de développement durable (en anglais Sustainable Development Goals - SDGs - qui ont remplacé les Objectifs du millénaire pour le développement - OMD). Selon l'Amref, l'accent doit être mis sur la santé maternelle et infantile. Cela est au coeur des actions de l'Amref. Nous proposons des solutions africaines aux problèmes de santé, car cela résoudra de nombreux autres problèmes des femmes et des enfants qui vivent dans les zones reculées à travers des approches novatrices. À ce titre, nous nous intéressons à tous les aspects liés à la santé maternelle et infantile. Notre réponse se veut être une réponse à 360 degrés, qui propose de prendre en charge la femme dés le début de sa grossesse, et ensuite nous nous assurons que les enfants qui naissent soient suivis, soignés. Mais notre priorité est qu'ils naissent dans des bonnes conditions parce que vous savez qu'en Afrique la femme représente le pilier de la maison et si cette femme n'est pas soignée ou en bonne santé, c'est toute la maison qui est malade.

Esther Madudu, vous en savez quelque chose... Comment vous est venue votre vocation ?

 

Esther Madudu : J'avais douze ans lorsque j'ai assisté à mon premier accouchement. J'étais vraiment impressionnée et je voulais comprendre comment ma grand-mère travaillait. Mon principal travail est de prendre soin des femmes enceintes, de les accueillir, de les accompagner vers l'accouchement et les aider à mettre au monde leur bébé dans les meilleures conditions possible. Et comme le dit si bien le docteur Sylla, les objectifs de la campagne sont de faire connaître notre profession au monde entier, ensuite d'alerter sur le manque de formation, et bien entendu de travailler avec les gouvernements sur les progrès à faire, les conditions à mettre en place. Heureusement, dans les zones reculées, les communautés nous soutiennent énormément.

Allez-vous réévaluer votre programme ?

Dr Sylla Thiam : Cette campagne a été lancée en 2011, un peu au même moment où ont été fixés les OMD, mettant l'accent sur la santé maternelle et infantile. Nous avons donc revu notre apport, parce qu'en tant qu'institution africaine, nous devons apporter nos solutions africaines. Notamment sur les questions de ressources humaines parce que c'est un problème fondamental dans la plupart de nos pays, en termes de quantité, mais aussi en termes de qualité.

Quels constats faites-vous sur le terrain ?

Esther Madudu : Les difficultés que nous rencontrons chaque jour en Ouganda ou en Afrique, c'est surtout le manque de sages-femmes. Nous ne sommes pas assez nombreuses, et parfois mal formées. Souvent, nous devons aussi faire face à l'absence de médicaments et d'équipements pour faire naître les bébés dans de bonnes conditions. Sans compter le manque d'espace, nous devons effectuer toutes les tâches dans une seule pièce, c'est-à-dire, accueillir les femmes enceintes, les faire accoucher, les soigner, suivre les mamans, et même parfois nous recevons dans cette même pièce pour des conseils de planification familiale !

Dr Sylla Thiam : Il faudrait qu'on forme plus de sages-femmes. Elles sont le premier contact des femmes enceintes. À l'Amref, nous avons décidé d'en former 15 000 dans toute l'Afrique. Notre deuxième objectif a été de reconnaître l'engagement des sages-femmes qui sont dans les zones rurales. Elles apportent plus qu'une simple fonction. Il leur est demandé de faire office de médecin, de sage-femme, d'infirmière, et dans ce cadre nous avons choisi un visage pour les représenter. Nous avons choisi Esther Madudu qui est une grande sage-femme ougandaise qui travaille dans une zone reculée de son pays, et nous avons poussé encore plus loin le processus en disant que le rôle des sages-femmes soit reconnu en la présentant pour le prix Nobel. Le troisième objectif était de mobiliser des ressources parce qu'il ne faudrait pas qu'on attende que les autres financent nos propres objectifs de santé. Donc, on a voulu stimuler la contribution des Africains en organisant la campagne " Un Africain, un dollar " et trois ans après, nous sommes déjà à mi-chemin et avons formé plus de 7 000 sages-femmes dans 7 pays à travers le continent. Actuellement, Esther est une figure emblématique reconnue partout. Le constat est que les choses avancent, puisque dans tous les pays où nous intervenons les gens contribuent financièrement. Par exemple, nous venons d'organiser un gala au Kenya où des Africains ont mobilisé, sous forme de fundraising, 75 000 dollars.

Que faut-il attendre de la deuxième phase du programme " Stand up for African Mothers "

Dr Sylla Thiam : En 2018, on va aller plus loin en formant 7 000 autres sages-femmes pour atteindre l'objectif de 15 000 sages-femmes au total. Il y a des progrès qui sont faits et il y a beaucoup d'initiatives. Quand on regarde les résultats, c'est vrai que les taux sont quand même très faibles. Cela pour plusieurs raisons, d'abord l'acceptabilité qui demande d'abord un changement de comportement. Parce qu'il faut du temps pour changer les comportements. Dans les milieux urbains par exemple, ça évolue vite, la planification familiale est entrée dans les moeurs. Par contre, dans les zones plus rurales, c'est plus compliqué même si des efforts louables sont notés.

En octobre 2015, plus de 7 000 sages-femmes ont déjà pu bénéficier des programmes de formation de l'Amref dans 7 pays d'Afrique. © Amref

Esther Madudu : Mon rôle est d'alerter sur le rôle des sages-femmes en Afrique. Il y a beaucoup de contacts sur le terrain. Je rends visite, j'explique, je les représente à travers le monde. Tous ceux qui sont intéressés par le rôle des sages-femmes peuvent me contacter !

 

Dr Sylla Thiam : Je suis très optismite dans la mesure où on parle désormais des objectifs de développement durable. Les leçons apprises des OMD montrent que s'il y a une mobilisation internationale de tous, on peut y arriver. Dans tous les pays, les objectifs de santé ont été atteints pour certaines maladies, comme les maladies infectieuses ou le VIH sida, ou encore le paludisme. Il y a eu des efforts considérables qui ont été faits, les taux ont diminué, actuellement on est à moins de 500 décès par an. C'est encore trop, mais si vous comparez à la situation d'il y a une dizaine d'années, c'est beaucoup moins. Tout ça est possible parce qu'il y a une mobilisation des États, et de nombreux pays sont en train d'éliminer le paludisme. La même chose peut être faite pour la santé maternelle et infantile. Nous participons à de nombreux forums et colloques pour rencontrer les dirigeants et partenaires économiques. Mais notre message est que les ressources humaines sont fondamentales. Et pour cela, nous avons lancé une université panafricaine basée au Kenya, l'Amref panafrican university. Depuis le début, nous nous sommes attelés à former des sages-femmes, mais nous souhaitons institutionnaliser cela dans tous les pays du continent.

Que font les gouvernements africains pour vous accompagner ?

Esther Madudu : Les gouvernements font beaucoup. Je suis employée par le gouvernement qui paie les salaires et achète les médicaments. Il installe aussi de nouveaux équipements pour nous accompagner. Je suis passionnée par ce métier, et je pense que les femmes africaines ont besoin de sages-femmes africaines. Ce qui me conduit à continuer à exercer mon métier en Afrique.



Source : afrique.lepoint.fr


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