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Afrique - Entreprises françaises : l'heure du réalisme a sonné

  Business, #

En matière de développement, l'Afrique a longtemps fait figure de parent pauvre. Isolée et privée de dynamisme économique pendant des décennies, elle s'est vue stigmatiser, notamment par l'instabilité de ses régimes politiques. Sur les 30 dernières années, on peut parler d'abord de pessimisme durant les années 90. L'investissement limité des entreprises était évidemment corrélé aux événements africains : guerres civiles, famines, etc. Puis, les années 2000 amènent davantage d'optimisme. On parle même d'afro-optimisme, sur la lancée de la vague des démocratisations ou encore du développement des technologies... Aujourd'hui, en 2015, l'évaluation du potentiel du continent est devenue beaucoup plus encourageante, même si certains événements (ex. : Ebola) incitent aussi à une certaine prudence. On constate donc un certain réalisme.

L'Afrique bouge, la vision des entreprises aussi

Les entreprises n'ont pas peur d'investir dans une stratégie à long terme. Dans la 6e édition de l'Observatoire du développement international, mené par BearingPoint et HEC, il est constaté que si 38 % des entreprises indiquent que l'Afrique représente moins de 5 % de leurs revenus, elles ne sont plus que 14 % à projeter qu'il en sera de même dans 5 ans. Plus de la moitié du panel envisage que leur chiffre d'affaires sera constitué entre 5 et 20 % par les activités déployées en Afrique, et une entreprise sur cinq évalue cette projection à plus de 50 % du CA ! Les perspectives existent et les entreprises en sont conscientes. Un des constats de l'étude concerne la présence à date des entreprises sur le continent. L'étude montre que les entreprises répondantes ont développé leurs activités dans 54 pays ; soit l'intégralité des pays du continent. Cela signifie que le continent est couvert à 100 % avec des pays tels que la Somalie, le Soudan du Sud ou encore le Swaziland. Beaucoup d'exemples de pays renforcent l'idée que l'Afrique regorge d'opportunités encore méconnues par le paysage économique français.

Côte d'Ivoire et Maroc, champions en matière de présence française

L'analyse des pays de présence fait ressortir la Côte d'Ivoire et le Maroc comme les deux pays les plus cités avec 82 % et 74 % des répondants respectivement. En Côte d'Ivoire, l'économie est dominée par l'exportation du café et du cacao, faisant du pays le premier producteur et exportateur mondial de cacao. Le Maroc ressort comme une évidence pour les entreprises françaises par sa proximité avec la France au niveau tant géographique qu'historique et culturel. Les entreprises françaises s'intéressent depuis longtemps au Maroc parce qu'elles y bénéficient de coûts du travail plus intéressants. Nous constatons également que 3 des 5 pays de plus forte présence sont des pays avec des PIB significatifs : le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Algérie (plus de 190 milliards d'euros). Ce sont des pays riches en ressources : pétrole pour le Nigeria et l'Algérie et minerais pour l'Afrique du Sud. En revanche, la Côte d'Ivoire, pays le plus représenté, se différencie, puisqu'il est doté d'un PIB moins significatif (26 milliards d'euros). L'Égypte et l'Angola sont des pays à fort PIB, mais ne figurent pas dans le top 10 des pays les plus convoités. Cela peut notamment s'expliquer par le contexte sociopolitique, toujours en cours de stabilisation dans ces deux pays.

L'Afrique désormais ciblée pour ses consommateurs

Si l'attrait des entreprises pour les pays africains a longtemps été corrélé à des atouts territoriaux, il évolue avec l'explosion démographique et l'émergence d'une société de consommation. Traditionnellement, les entreprises allaient en Afrique pour les ressources naturelles grâce à des sols parmi les plus riches au monde. L'ODI 2015 démontre une tendance changeante, puisque l'exploitation des ressources n'est citée que par moins de 10 % des répondants. En tête des secteurs les plus sollicités, la distribution (58 % des répondants), directe ou indirecte, domine, selon l'étude. Les aspects de distribution cités concernent : l'énergie, la santé, l'agroalimentaire ou encore l'automobile. L'émergence d'une classe moyenne africaine, au pouvoir d'achat croissant et aux aspirations fortes, attire les entreprises du secteur qui souhaitent satisfaire un besoin jusque-là négligé. Les secteurs du service aux entreprises (35 % des répondants) ou encore de la transformation industrielle (20 % des répondants) confortent la promesse du continent africain notamment par rapport à des compétences locales reconnues, avec un coût plus intéressant que les pays européens. Dans le même temps, les barrières auxquelles les entreprises devaient faire face par le passé semblent s'être amoindries.

Dès lors que les cartes sont rebattues, la nature, la structure et le mode de financement des activités évoluent de la même manière. Jusque-là, les entreprises qui s'implantaient en Afrique étaient, pour une large part, issues d'un secteur à forte intensité capitalistique, financées par les États européens (secteur pétrolier ou de l'électricité), et requérant les implications des autorités locales. Aujourd'hui, l'ouverture semble se confirmer. De nouveaux territoires d'expression ont émergé avec des opportunités d'ampleur pour les investisseurs. Par ailleurs, en fonction des secteurs, il est dorénavant envisageable de développer des activités sans recourir au même niveau de capital ou d'immobilisation. Les entreprises peuvent s'implanter plus rapidement, en faisant appel à des partenaires locaux en toute flexibilité.

L'Afrique, un continent, oui, mais avec 54 pays...

Au-delà de son image de parent pauvre, l'Afrique est aussi l'objet d'un autre préjudice : celui d'être perçue comme une seule masse uniforme, une zone géographique à part entière. L'Afrique ne peut être réduite à un découpage par les entreprises sur un nombre de zones limité. Il y existe 54 pays différents, soit une multitude de langues, une multitude de cultures, une multitude de ressources, et donc une multitude d'opportunités. On peut donc parler de " plusieurs Afriques ". Plusieurs tentatives de taxonomie ont essayé d'ordonner, de manière un peu traditionnelle, les pays d'Afrique, selon leur niveau de développement, leur profil géopolitique, leur attractivité économique... Certes, un peu désuètes à l'heure où l'on parle d'un continent tout à fait hétérogène, certaines de ces classifications méritent d'exister et sont utilisées : celle des pays anglophones versus francophones, celle des dotations naturelles, ou encore celles des économies dynamiques.

... et des opportunités diverses

Pour comprendre la diversité des opportunités dans le continent, l'étude a mis en avant les pays les plus attractifs pour faire ressortir des pays priorisés par les entreprises. La Côte d'Ivoire arrive en tête avec 50 % des entreprises interrogées qui y sont implantées. Bénéficiant d'une classe moyenne montante, la Côte d'Ivoire est souvent l'un des premiers pays subsaharien dans lequel les entreprises françaises s'implantent. Après la crise post-électorale de 2010, les bailleurs de fonds ont décidé d'investir massivement sur le pays avec la conversion d'une partie de la dette souveraine en aide au développement, ce qui contribue bien sûr au succès du pays. L'Afrique du Sud et le Maroc sont tous les deux cités à un peu plus de 40 %. Locomotive de l'Afrique anglophone, l'Afrique du Sud, avec ses 54 millions d'habitants et des capitales de premier plan comme Johannesburg ou Le Cap, représente une part importante du PIB du continent et son économie est la deuxième du continent, juste derrière le Nigeria. Nombre de sociétés rayonnant en Afrique anglophone, y compris dans les services, y ont établi leur siège. Le Maroc ressort comme une évidence pour les entreprises françaises par sa proximité avec la France au niveau tant géographique que culturel et linguistique. Le Nigeria est cité par 36 % des entreprises : incontournable " géant " de l'Afrique (économique et démographique), le pays est le 1er producteur de pétrole du continent. Selon les projections du PRB (Population Reference Bureau), en 2050, le pays sera le 4e pays le plus peuplé du monde après l'Inde, la Chine, les États-Unis, alors qu'il occupe actuellement la 7e place. Il est intéressant de regarder de plus près les pays cités ensuite. L'Égypte, citée par 11 % des répondants, arabophone avec une culture anglophone en second plan, s'illustre par le tourisme. Très récemment, l'Égypte a bénéficié de la découverte offshore de gaz naturel au large de ses côtes, et qui permettrait au pays de faire face à ses besoins en gaz pendant les prochaines décennies. Sont cités spontanément ensuite une série de pays, comme l'Éthiopie, le Kenya ou encore le Sénégal. Ce fait illustre que les entreprises prennent peu à peu conscience de la diversité des opportunités en Afrique.

Pour se mettre en position de capter tout le potentiel de diversité que le continent peut offrir, les entreprises doivent construire le développement de leurs activités en Afrique comme une stratégie à long terme, et non dans une logique de profit à court terme. Capter les ressources naturelles ici, s'appuyer sur une classe moyenne montante pour distribuer des biens de consommation là, ou encore profiter d'un pôle de développement technologique où les compétences sont disponibles et l'écosystème d'aide à l'implantation des entreprises favorable. Il s'agit ensuite de regarder l'ensemble des régions et des pays avec leurs opportunités propres.

* Consultant à BearingPoint.



Source : afrique.lepoint.fr


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