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Afrique : les faux "démocrates" contre Internet et les réseaux sociaux

  Politique, #

L'accès à Internet et aux réseaux sociaux sera-t-il coupé à l'occasion de la présidentielle gabonaise, le samedi 27 août ? Dans ce petit pays d'Afrique centrale, qui compte 1,6 million d'habitants et un taux de pénétration d'Internet estimé à environ 70 %, plane la " rumeur persistante d'une éventuelle perturbation des réseaux sociaux ", peut-on lire sur le site d'information gabonlibre.com. Aussi le ministre de l'Intérieur Pacôme Moubelet Boubeya a-t-il tenu à affirmer, à quatre jours du scrutin, et tandis qu'il recevait une délégation d'observateurs internationaux du processus électoral, que les réseaux sociaux ne seraient ni " suspendus " ni " perturbés " le jour du vote. Et d'ajouter, à propos d'Internet : " Nous avons tous besoin de cet outil. "

Internet, qui se développe surtout à la faveur de la connexion mobile et de l'explosion des ventes de smartphones sur le continent, a, certes, ouvert un boulevard à la communication politique, via Facebook, Twitter, ou Instagram. Les hommes politiques s'y ruent. Citoyens et militants de tout bord ne sont pas en reste. De fait, Twitter est dominé par les conversations politiques en Afrique plus qu'ailleurs, relevait en avril le cabinet britannique Portland Communications dans son étude " Comment l'Afrique tweete ".

Coupures en série d'Internet et des réseaux sociaux

Cette " révolution " dans la parole politique tourne cependant parfois au " paradoxe ", note gaboneco.com, quand Internet, lieu de l'" instantanéité des échanges et de la circulation de l'information ", attise dans le même temps la méfiance de certains régimes. Au point qu'ils décident parfois de verrouiller son usage. De récentes élections présidentielles en sont l'illustration. Au Congo-Brazzaville, le scrutin du 20 mars dernier s'est déroulé dans un black-out total : ni téléphone ni Internet durant plus de deux jours. Même climat de censure sur la Toile en Ouganda un mois plus tôt, ou au Tchad lors de la présidentielle du 10 avril. Depuis lors, les Tchadiens se voient d'ailleurs privés d'accès aux réseaux sociaux.

Les contrôles et les restrictions du cyberespace se sont particulièrement multipliés à travers le continent ces derniers jours. En Zambie, la connexion internet a été coupée le 16 août dans trois provinces du Sud-Oouest, nous apprend le fanzine ITWeb Africa. On y contestait la victoire électorale, annoncée la veille, du président sortant. Au Mali, c'est dans un contexte protestataire, bien que déconnecté de tout enjeu électoral, que Facebook et Twitter ont également été suspendus la semaine dernière. Une première dans ce pays, longtemps présenté comme la vitrine d'une presse plutôt libre, indépendante et plurielle. Mais la situation a dégénéré à partir de 2012, date de début de la crise politico-sécuritaire dans le nord. Le Mali a ainsi rétrogradé de la 37e place (sur 160) à la 118e place (sur 179) entre 2005 et 2015 dans le classement mondial de la liberté de la presse de Reporter sans frontières (RSF). " Pourrissements à haut débit ", titre le quotidien malien L'Indicateur du renouveau, à propos de cette répression sur Internet, qui se conjugue à une répression meurtrière dans la rue lors d'une manifestation qui a dégénéré à Bamako. " Grave entorse à la liberté d'expression ", renchérit son confrère Le Républicain.

Une nouvelle loi répressive en Angola

La liberté d'expression subit par ailleurs de sérieux coups de boutoir en Angola. Le 12 août dernier, l'Assemblée nationale a voté une série de quatre lois sur les médias et la communication. Elles sont présentées comme une avancée démocratique par le parti au pouvoir, le MPLA. Les journalistes ne sont pas du même avis. Le secrétaire général du syndicat des journalistes angolais, Teixeira Candido, qualifie de " liberticide " ce texte, qui oblige notamment les médias à retransmettre les discours officiels du président José Eduardo dos Santos, rapporte BBC Afrique. Maka Angola voit quant à lui dans cette nouvelle législation un vecteur " de contrôle et de censure des médias de masse, y compris des médias sociaux ".

" Le dernier stratagème de l'Angola pour faire taire la critique : une instance régulatrice pour censurer les médias sociaux ", titre le journal en ligne angolais, qui fait référence à une des dispositions de ce paquet législatif : la création de l'Instance régulatrice de la communication sociale en Angola. Cette structure pourra délivrer les accréditations professionnelles aux journalistes, mais aussi les retirer. D'autres mesures confèrent aux autorités le droit de poursuivre et d'arrêter " toute personne ou organisation " qui dérogent aux " valeurs sociales, culturelles, éthiques et patriotiques ", ou aux " bonnes pratiques journalistiques ". " Mais qui définit les valeurs et les bonnes pratiques ? " se demande Maka Angola. Pour le rédacteur en chef du site Rafael Marques de Morais, ces lois visent à " contrôler et à censurer toute tentative par des militants d'utiliser les médias sociaux et Internet pour dénoncer les cas les plus flagrants de corruption, de népotisme et d'abus de pouvoir ". Des dénonciations, dont Maka Angola est coutumier, et qui ont déjà valu à son responsable des ennuis judiciaires. Les nouvelles lois angolaises interviennent dans le contexte d'un durcissement de la répression contre les opposants. En décembre 2015, le président Dos Santos avait annoncé la couleur. " Les réseaux sociaux ne doivent pas être utilisés pour violer les droits du peuple, humilier, calomnier ou véhiculer des contenus dégradants ou moralement offensants. [...] Le pays doit se doter dès que possible d'une législation adéquate pour guider la société et prévenir l'émergence de telles pratiques qui sont inacceptables ", avait déclaré José Eduardo dos Santos, à la tête du pays depuis 1979. " Manzé [surnom du président angolais, NDLR] a perdu la tête ", réagissait alors Maka Angola sur Facebook.

Le Zimbabwe peaufine une législation sur le cyberespace

Autre régime tenté par la régulation des réseaux sociaux : le Zimbabwe, où une loi sur la cybercriminalité est étudiée au Parlement. Le pays de Robert Mugabe fait face à une contestation inédite, partie d'une simple vidéo postée sur Facebook et Twitter en avril par un pasteur exaspéré. Ce cri du cœur s'est transformé en quelques clics en un mouvement anti-Mugabe, qui a essaimé. Des contestations hétérogènes, faisant fi des générations, des appartenances politiques, militantes ou religieuses, se sont fait jour. " La révolution se fera par les hashtags ", estimait en mai un journaliste zimbabwéen dans la revue African Arguments. " Sur les médias sociaux, tels que Facebook et Twitter, le ras-le-bol des citoyens zimbabwéens s'est transformé en colère, face à la corruption galopante, le chômage et la brutalité policière ", analyse le quotidien zimbabwéen The Standard. Il souligne que des responsables du régime ont déjà mis en garde. " Le commandant des Forces de défense zimbabwéennes Constantino Chiwenga a déclaré que les Zimbabwéens menaient une cyberguerre contre le gouvernement ", tandis que " le ministre de l'Information Christopher Mushohwe est entré dans le débat en disant que le gouvernement ne resterait pas les bras croisés pendant que le peuple viole la Constitution à travers les médias sociaux ", écrit-il. Un peu plus tôt, le président Mugabe avait comparé cette vague protestataire aux révolutions arabes de 2011, tout en prévenant que la contestation était inutile.

Criminaliser l'usage des réseaux sociaux

La loi sur le cybercrime, comme son nom l'évoque, entend criminaliser certains usages d'Internet. " Elle vise à accuser des Zimbabwéens d'abuser des médias sociaux pour inciter à la violence, au banditisme, au sabotage et à l'instabilité générale dans le pays. Le principal objectif de la loi est de punir ceux qui sont derrière l'ordinateur ", explique The Standard dans un autre article. Il s'intitule " Mugabe, assiégé, s'oriente vers une loi draconienne contre les cyberterroristes ". La loi sera-t-elle adoptée par le Parlement ? Pour le titre zimbabwéen, le gouvernement, qui a déjà dégainé une législation similaire par le passé, visant alors les médias privés, " mène une bataille perdue d'avance ". " Internet ne peut pas être coupé, même par les régimes les plus autocratiques, et en particulier par ceux qui sont en faillite ", conclut-il, optimiste. Comme si " la révolution des hashtags " était inébranlable. Reste qu'elle se développe rapidement en Afrique.

Dans son rapport " Comment l'Afrique tweete " 2015, l'agence Portland communication notait que le continent africain franchissait un cap en 2015 " avec la prévalence de débats sérieux sur la politique et les pouvoirs publics ". C'est aussi l'année où est apparu le premier hashtag politique : #Nigeriadecides, au moment de l'élection présidentielle. Une de celles qui ont consacré l'alternance politique sur le continent.



Source : Le Point Afrique


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