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Afrique : un continent à la carte

  Société, #

Méconnue en France, la cuisine d'Afrique noire offre une variété de produits et de recettes exceptionnelle. Des chefs (enfin) commencent à la faire sortir de l'ombre.

C'est le grand absent de la déferlante gastronomique contemporaine. Alors que l'on découvre et explore aujourd'hui les mille saveurs du monde, de la Corée au Pérou, en passant par l'Inde, le Brésil ou la Nouvelle-Zélande, le continent africain reste largement ignoré - à l'exception du Maghreb (et de son couscous devenu le " plat préféré des Français "). De la cuisine d'Afrique subsaharienne, on ne sait presque rien. Pourquoi, malgré l'intégration en France d'une vaste communauté africaine, les plats, produits et cuisiniers d'Afrique noire restent-ils ainsi dans l'ombre, loin de tout écho médiatique ?

La question taraude Julien Pham, rédacteur en chef du magazine culinaire urbain Fricote, qui a consacré son dernier numéro au continent noir. " J'adore l'Afrique et sa cuisine, assure Pham, mais ce n'est pas évident d'en faire un dossier : il y a très peu de chefs français qui s'intéressent aux produits ou aux recettes, pourtant délicieuses, de ces pays. " Est-ce parce que les cuisines africaines, issues de transmissions orales, manquent cruellement de documentation ? Ou parce que ce sont des plats paysans, rustiques, bouillis, en sauce, pas des plus raffinés ni esthétiques ? Est-ce lié aux lieux urbains, bouis-bouis et quartiers comme Château-Rouge à Paris, où l'on retrouve " le goût du bled " mais qui restent encore ghettoïsés ?

Pour l'historien Jean-Baptiste Noé, la logique historique est simple : " L'Afrique noire est l'un des continents découverts le plus tardivement sur le plan culturel. Les négriers ne connaissaient que les côtes, et les colons ont préféré reproduire la vie européenne plutôt que goûter aux produits sur place. " Résultat : cela fait à peine cinquante ans que l'on s'intéresse aux goûts de l'Afrique, pourtant " berceau de produits extraordinaires ". " La cuisine africaine en est à ses balbutiements, confirme le chef d'origine camerounaise Alexandre Bella Ola. Elle manque de soldats prêts à défendre et à répandre leur culture. " Dans son restaurant Rio dos Camaraos à Montreuil, ce cuisinier autodidacte et pédagogue, considéré par beaucoup comme le pape de la cuisine africaine, mitonne depuis vingt ans les plats typiques de là-bas : le célèbre mafé, bien sûr, recette malienne à base de sauce arachide ; le yassa sénégalais, avec sa sauce aux oignons, olives et citron ; l'attiéké ( Côte d'Ivoire) à base de semoule de manioc ; le tiep bou dienn, ou riz au poisson ( Sénégal) ; le N'dolé à base d'épinards amers ou encore le poulet DG, deux emblèmes du Cameroun.

" L'Afrique et l'Europe n'ont pas le même rapport à la nourriture, analyse le chef. En Afrique rurale, on mange une fois par jour, tous ensemble, avec les mains. C'est une cuisine mijotée qui demande patience et disponibilité. " Eléments qui, selon lui, sont inadaptés à l'univers urbain moderne, où il faut savoir être rapide, efficace et séduisant à la fois. " Les cuisiniers africains n'arrivent pas encore à transposer leur expression, à réfléchir et s'adapter. " Pourtant, à Paris notamment, le secteur compte quelques initiatives dynamiques : petits comptoirs rapides comme Afrik'n'Fusion et Best Africa, food trucks " afropolitains " tels Le Tricycle ou Black Spoon. Mais pour Bella Ola, " ces gens sont surtout des entrepreneurs, qui veulent gagner de l'argent rapidement, alors que la cuisine africaine, c'est lent ! ". La solution ? Il faut d'abord apprendre à travailler les produits, que l'on trouve, selon le chef, facilement en France : manioc, gombo, sorgho, bissap, safou, poissons frais et séchés, fruits et innombrables épices...

Après un passage rapide à " Top Chef ", le jeune chef d'origine congolaise Dieuveil Malonga, qui voue une passion aux produits de son continent, s'est donné pour mission de " rendre hommage à l'Afrique, à travers un nouveau regard ". Chef itinérant, il accommode les saveurs et traditions africaines à la sauce moderne, jouant la carte de l'afro-fusion pour des mafés revisités, des yassas de caille, des assiettes bigarrées où se rencontrent vanille de Madagascar, fruit de la passion et poudre de baobab, raviolis de plantain et morue, mangues sauvages, sauté d'agneau et ignames violets. Parmi ses projets, outre l'ouverture d'un restaurant, la publication d'une " cartographie de l'Afrique gourmande ", ses produits et ses recettes. Un travail de titan. " Personne n'a encore fait ça, s'enthousiasme Julien Pham, définir les goûts et les couleurs de l'Afrique. C'est grâce à ce genre d'initiative que la sauce africaine pourrait enfin prendre. "

Carnet d'adresses :
Rio dos Camaraos, 55, rue Marceau, Montreuil (93).
My Food Montreuil (sud-africain) 22, rue Robespierre, Montreuil (93).
L'équateur, 151, rue Saint-Maur, Paris 11ème.
Waly-Fay, 6, rue Godefroy-Cavaignac, Paris 11ème.
Sheger (éthiopien) 2, passage du Jeu-de-Boules, Paris 11ème.
La Gazelle, 9, rue Rennequin, Paris 17ème.
Epicerie El Mundo, 28, rue Poulet, Paris 18ème.

À lire :
Cuisine actuelle de l'Afrique Noire, d'Alexandre Bella Ola, éd. First-Gründ, 2012, chefmalonga.com.

lemonde.fr


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