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Biram Dah Abeid : Il lutte contre l'esclavage...en 2016

  Société, #

Il aurait pu connaitre le même destin que Nat Turner mais après 2 ans de détention, le militant des droits de l'homme, Biram Dah Abeid, va sortir de prison. Il y était enfermé à cause de son combat pour la liberté, de sa lutte pour rompre les honteuses chaines de l'esclavage dans un pays où l'histoire semble n'avoir jamais entendu parler de Victor Schoelcher.

L'esclavage a été aboli en 1848 pour le commun des mortels mais en Mauritanie, il a fallu attendre 1981, le 9 novembre plus précisément, pour que l'Etat, par le biais d'une ordonnance, mette officiellement fin à la pratique qui voyait les Maures noirs réduits aux chaines et à la servitude par les Maures blancs du pays. Un projet de loi prévoyant des sanctions pénales contre ceux qui pratiquent l'esclavage a même été adopté par le parlement en 2007. Mais après le coup d'Etat de 2008, les sanctions ne sont plus appliquées. L'esclavage reprend de plus belle dans le pays et peu de personnes osent s'y opposer. Mais la lutte contre l'esclavage ne tardera pas à avoir un visage : celui de Biram Dah Abeid, président de l'IRA (l'Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste).

 

Petit fils d'esclave dans un pays aux mœurs anachroniques

La famille de Biram Dah Abeid fait partie de la caste des Haratins, celle des maures noirs descendants d'esclaves. D'ailleurs, le père du président de l'IRA a été affranchi par le maître de sa grand-mère, qui était encore esclave. Cela fait de Biram Dah Abeid, né le 12 janvier 1965 à Rosso en Mauritanie, l'un des premiers enfants nés libres dans sa famille. Cette dernière, consciente que les chaines de l'ignorance ne sont jamais loin de celles de la servitude décide de l'envoyer à l'école. Premier enfant de sa famille à être scolarisé, Biram Dah Abeid, a un cursus scolaire sans accroc. A l'université, il choisit d'étudier le droit et l'histoire, pour que le futur ne puisse lui prendre ce qui avait été refusé aux siens par le passé. Il consacre sa thèse à l'esclavage, une pratique qui, bien qu'interdite, est toujours répandue dans le pays. Décidé à consacrer sa vie à la lutte contre l'esclavage, il s'engage, à la fin de ses études, comme militant au sein de l'ong ''SOS Esclaves''.

Embastillé pour avoir tenté de briser les chaines de l'esclavage

Le 25 mars 2007, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi est élu président de la Mauritanie lors des premières élections libres du pays depuis l'indépendance. Il fait voter, par le parlement, la loi n°2007-048 du 3 septembre 2007 portant incrimination de l'esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes. Cette loi prévoit une " peine d'emprisonnement de cinq à dix ans " et " une amende ", pour toutes les personnes pratiquant l'esclavage sur le territoire mauritanien. Tout semble en marche pour que l'esclavage soit définitivement banni du pays. Mais le coup d'État d'août 2008 viendra mettre fin aux espoirs des populations touchées par l'esclavage.

Le 6 août 2008, le président mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdallahi opère des changements à la tête de l'armée, de la gendarmerie et de la garde nationale. Il limoge les généraux Ould Cheikh Mohamed Ahmed et Mohamed Ould Abdel Aziz qui avaient conduit, de 2005 à 2007, la transition démocratique dans le pays. Ces derniers refusent d'accepter la décision et renversent lors d'un coup d'État, le président élu. Les putschistes, dirigés par le général Mohamed Ould Abdel Aziz, l'actuel président, annulent les nominations au sein de l'armée décidées par le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Après le coup de force, la loi prévoyant des sanctions contre les esclavagistes n'entre plus en vigueur ; pire la pratique reprend de plus belle. Biram Dah Abeid décide alors de fonder l'Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA).

L'organisation se signale alors par une propagande agressive contre l'esclavage. Elle s'attire les foudres du gouvernement en dénonçant le laxisme de ce dernier face à l'esclavage. En 2012, Biram Dah Abeid brûle des textes de droit de l'école malikite, l'une des écoles du droit musulman qui, selon lui, légitime l'esclavage. Il est arrêté avec quelques membres de son organisation et envoyé sans procès en prison. L'IRA présente ses excuses pour l'incident qui a choqué l'opinion publique. Après quelques mois de détention préventive, le procès des détenus est annulé pour vice de forme par la cour criminelle de Nouakchott. Ils sont libérés en septembre 2012. Mais Biram Dah Abeid n'arrête pas son combat pour autant. Ses actions sont plus modérées, plus efficaces, à tel point qu'en 2013, il reçoit le " Front Line award for Human Rights Defenders at Risk " de l'ong irlandaise ''Front Line Defenders'' qui lutte contre les droits de l'homme. La même année, il est désigné parmi les six lauréats du prix des droits de l'homme, décerné tous les cinq ans par l'ONU à des personnes ayant œuvré pour la défense des droits de l'homme.

En 2014, Biram Dah Abeid se présente aux élections présidentielles. Au 1er tour, il est second avec 8,6 % des suffrages. Il est battu au second tour par Mohamed Ould Abdel Aziz qui récolte 81 % des voix. En novembre de cette même année, retour derrière les barreaux pour Biram Dah Abeid, en compagnie de neuf membres de son organisation, cette fois-ci. On leur reproche d'avoir pris part à une caravane contre l'esclavage. Le président de l'IRA est condamné, le 15 janvier 2015, à 2 ans de prison ferme. Les organisations de défense des droits de l'homme s'indignent et demande la libération des membres de l'IRA arrêtés arbitrairement. Le gouvernement mauritanien résiste et maintient Biram Dah Abeid et les autres détenus derrière les barreaux. Le 13 août 2015, une loi pénalisant l'esclavage entre enfin en vigueur en Mauritanie. La pratique reste malgré tout répandue dans le pays, où 4% de la population serait toujours en esclavage.

Ce mardi 17 mai, la Cour Suprême de Mauritanie a ordonné la libération de Biram Dah Abeid. La figure de la lutte contre l'esclavage dans le pays va retourner à sa famille mais également aux militants de son association qui n'ont jamais arrêté de réclamer sa libération. Le président de l'IRA pourra donc, après avoir vaincu les barreaux, retourner au combat de sa vie ; une lutte qui ne s'arrêtera que lorsque les dernières chaines de l'esclavage, en Mauritanie, auront été brisées.



Source : Ecce Africa


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