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Compton, l'album du Dr. Dre qu'on n'attendait plus...

  Musique, #

La sortie du troisième et dernier album de Dr. Dre, Compton, est un événement mondial mais pas local. A Los Angeles, le 6 août, à une heure de la diffusion de ses nouveaux morceaux sur la plate-forme musicale Apple, personne n'est bouleversé par l'annonce faite par le rappeur lui-même le 31 juillet, sur l'antenne de la radio numérique Beats1, de l'arrivée de son nouveau disque, en digital le 7 août, en physique le 21 août.

Dans un magasin de téléphonie mobile, un employé résume l'état d'esprit ambiant : " Depuis 2001 [son disque sorti en 1999], il nous bassine avec ça. A force de l'attendre depuis seize ans, on ne l'attend plus. " Dre a, en effet, tellement retardé la sortie de son projet Detox qu'il a fini par le jeter à la poubelle. " Pas assez bon ", de son propre aveu. A South Central et Watts, où le premier disque de Dr. Dre, The Chronic, fut considéré, à sa sortie en décembre 1992, comme la bande-son de ces quartiers noirs et latinos, même réaction. " A 18 heures, on a autre chose à faire qu'écouter un album sur un mobile en Wi-Fi. Et on n'a pas tous des iPhone. On rentre du boulot après des heures d'embouteillages. On se repose avant de se préparer pour le lendemain ", résume une habitante.

Les radios de Los Angeles, privées, elles, de cette exclusivité, préfèrent parler de la sortie prochaine du film Straight Outta Compton, consacré à son groupe N.W.A, fondé par Dr. Dre et Eazy E. Ce dernier, figure tutélaire de la ville, dealer des rues et membre du gang des Crips, avait réussi à défier le FBI avec son label, Ruthless Records, qu'il avait créé avec son manager, Jerry Heller, avant de mourir du sida en 1995. C'est cette histoire que raconte le film et c'est son tournage qui a convaincu Dr. Dre, coproducteur du film, de retourner en studio. L'homme d'affaires de 2015, âgé de 50 ans, s'est senti défié par le rappeur de 1988, jeune, culotté, sans peur.

Mais Compton, nouvel album de Dr. Dre, n'est pourtant pas la bande originale du film Straight Outta Compton comme annoncé, mais regroupe les musiques inspirées par le long-métrage, pratique courante dans le rap des années 1990. En 1995, La Haine, de Matthieu Kassovitz, avait eu aussi son album La Haine, musiques inspirées du film. Sur le sien, Dre invite tous ses anciens poulains (Snoop Dogg, Eminem, The Game, Xzibit, exception faite de 50 Cent) et ses nouvelles plumes (Kendrick Lamar, Jon Connor, King Mez, Justus). C'est avec les deux derniers que le producteur a écrit la majeure partie des titres. Il ne reprend pas la narration du film mais raconte en quoi sa ville, Compton, a été une telle source d'inspiration pour toute sa carrière.

 

Ouverture en fanfare

La pochette de son album pose déjà l'argumentaire. Le point de vue vient de Compton, les lettres d'Hollywood au-dessus de Beachwood Canyon ont été remplacées par celles de la commune au sud de South Central. La pochette est une vue aérienne vers les gratte-ciel de Downtown à partir des quartiers pauvres, inversant le regard des auditeurs, plutôt habitués à voir la ville à partir des hauteurs de Mulholland Drive. Le graphiste s'est arrangé avec la géographie locale : il n'y a pas de colline à Compton, juste un alignement de maisons.

L'album s'ouvre en fanfare sur une réinterprétation de la musique d'Universal Pictures. Une voix off, cérémonieuse, fait l'éloge de cette ville idéalisée par les Afro-Américains qui fuyaient la ségrégation du sud des Etats Unis dans les années 1950 : " Compton, c'était le rêve américain, la Californie ensoleillée, avec les palmiers dans la cour, le camping-car, le bateau... " Un rêve qui a tourné au cauchemar, continue encore la voix, " où, même si quatre conseillers municipaux sur cinq sont noirs, aucun n'a réussi à enrayer la criminalité et la paupérisation. Avec 47 meurtres l'an passé, Compton est une des villes les plus criminelles en densité par habitant ".

Les trois morceaux les plus inspirés

Cette belle intro est cependant gâchée par un excès de jeunisme du rappeur, qui après seize ans d'absence adopte la manière de rapper, très actuelle et surfaite, du sud des Etats-Unis, le trap. Il l'abandonne heureusement sur le reste de l'album. Ce premier morceau, Talk About It, introduit aussi ses deux nouveaux espoirs, King Mez, de Caroline du Nord, et Justus, rappeur blanc de Dallas, qui citent une des rimes les plus célèbres de The Notorious B.I.G., rappeur new-yorkais, un temps rival de la Côte ouest, et assassiné à Los Angeles, It Was All a Dream (" c'était tout un rêve "). Il faut attendre le deuxième titre pour retrouver la qualité de la production de Dr. Dre avec Genocide, qui mêle un toast ragga de l'Anglaise Marsha Ambrosius du groupe Floetryet la dextérité de celui qui va l'accompagner sur trois des morceaux les plus inspirés du disque : Kendrick Lamar.

Ainsi sur Darkside/Gone, la même équiperend un bel hommage à Eazy-E. King Mez, lui, remet les pendules à l'heure sur le mythe des rappeurs gangsters : " Non, je n'ai jamais vendu de drogue, mais je sais qui en a. " Dre ne rappe finalement en solo que sur un seul des seize titres de l'album, le dernier. Pour le reste, en bon producteur, il s'attache plutôt à déstabiliser ses partenaires de ces vingt dernières années : musique plus rock pour les anciens, Ice Cube et Snoop Dogg, jazz pour The Game... Il signe, de plus, une belle collaboration avec DJ Premier, son homologue de la Côte est, pour Animals. Du bon Dr. Dre, inattendu, joué dès le lendemain de la diffusion sur Apple sur bon nombre d'autoradios. Le mythe tient encore la route. Vendredi 7 août, dans l'après-midi, les lettres de Compton étaient dessinées dans le ciel de Los Angeles par des avions publicitaires.



Source : www.lemonde.fr


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aylin
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