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Petit, il voulait faire kiné ou basketteur. Le voilà danseur. Mais pas "juste" danseur. Le Guadeloupéen Davy Coumba, pétri de culture hip-hop, est danse-thérapeute. "Une approche qui utilise le mouvement dansé dans une visée thérapeutique", décrit-il, lui qui travaille en Seine-Saint-Denis pour des enfants hospitalisés, des femmes isolées, des SDF... "J'aime leur faire prendre conscience qu'on danse tous les jours sans s'en rendre compte. La danse, ce n'est pas QUE tourner sur la tête et faire le grand écart. Prenez la marche par exemple, c'est notre première façon de danser. S'il y avait quelqu'un sur la lune en train d'observer les humains, il verrait une immense chorégraphie !"
En septembre prochain, ce grand gaillard de 34 ans au large sourire entrera en deuxième année de master d'art-thérapie à la Sorbonne. Une forme de consécration pour celui qui a grandi seul avec sa mère, femme de ménage, au 15e étage d'une tour de Stains (93). Le clos Saint-Lazare, une cité pas toujours riante. "Quand je sortais de chez moi le matin, je prenais un petit mouchoir parce qu'il y avait souvent du sang dans l'ascenseur", se remémore-t-il. Sans compter le racisme qu'il subit à l'école, sans cesse renvoyé à ses origines antillaises.
"La danse m'a empêché de traîner dans la rue"En cette première quinzaine d'août, c'est dans un village de Seine-et-Marne qu'il nous reçoit, au beau milieu des champs. Il coorganise une semaine de stage "d' expression primitive" (technique qui s'inspire des danses traditionnelles et s'appuie sur les "rythmes premiers" : battements du cœur, respirations...). Davy intervient aux côtés de grandes pointures internationales telles qu'une danseuse du ballet traditionnel russe. "C'est drôle, moi qui viens du hip-hop, je me rends compte qu'on utilise les mêmes techniques !"
La danse, il tombe dedans à 18 ans, au lycée, à Noisy le Grand. Il est repéré (entre autres) par le collectif hip-hop Wanted Posse (peu de temps avant que le groupe n'acquière une renommée internationale, ndlr). A la question : "Hey, toi, tu danses ?", le jeune Davy répondra d'abord : "Bah non, moi je suis basketteur", avant de se raviser. C'est parti pour des années d'apprentissage de danses hip-hop (break, house, hype, newstyle, jazz rock, smurf... La1ère est devenue incollable). Il découvre alors cette culture du métissage qui lui plaît tant. "La danse, ça m'a empêché de traîner dans la rue, ajoute-t-il avec le recul. J'aurais pu prendre un autre chemin..." Sur son chemin, il croisera plutôt une multitude d'artistes tels que les artistes antillais Kery James ou E.sy Kennenga.
Une immense fiertéEn parallèle, Davy Coumba passe un diplôme d'éducateur spécialisé. Un peu pour travailler, un peu pour rassurer ses proches. Car à l'époque, dans son entourage, beaucoup s'inquiètent pour lui. A commencer par sa mère. Inquiets aussi ses oncles et ses tantes ("ils travaillaient tous à l'hôpital, pas dans la danse...") et ses grands-parents, restés à Sainte-Anne en Guadeloupe. "Ma mère ne voulait pas que je continue dans cette voie. Ses parents l'avaient poussée à venir en métropole avec le Bumidom pour s'en sortir. Elle voulait à son tour que je m'en sorte malgré la banlieue. J'ai compris bien plus tard qu'elle s'était saignée pour m'inscrire en collège privé."
Aujourd'hui, l'inquiétude a laissé place à la fierté. "Quand j'ai appris que j'étais pris à la Sorbonne, j'ai reçu plein de coups de fil de mes proches !, se souvient-il, ému. Je suis le premier de ma famille à entrer à l'université. Maintenant, je voudrais leur envoyer mon mémoire. C'est notre nom inscrit dessus : C.O.U.M.B.A." Ce mémoire de première année, 90 pages, 16/20, il n'en est pas peu fier. "Quatre mois de souffrance enfermé chez moi et 10 kg en plus", résume-t-il. Peu importe, il est prêt à recommencer l'année prochaine, quitte à poursuivre en doctorat l'année d'après.
Afrika BambaataaLa Sorbonne, c'est pour la théorie. Question pratique, même si tout n'est pas toujours rose sur le plan financier, il cumule les projets sous la casquette d'auto-entrepreneur (voir son site internet). Mieux, voilà un an que le Guadeloupéen se forme aux côtés de l'une des figures majeures de la danse-thérapie : la psychanalyste France Schott-Billmann. "France, j'essaye de l'intégrer dans le monde hip-hop. Elle ne connaît pas la banlieue, encore moins les maux de la banlieue", explique Davy avec tendresse.
Source : www.la1ere.fr | |||
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