" J'ai remarqué à quel point les chaussures avec des motifs colorés sont devenus à la mode et je me suis dit : pourquoi personne n'utilise nos magnifiques tissus africains pour fabriquer des chaussures ? " C'est en 2012 que le top model kenyan, Emo Rugene, a décidé de lancer sa propre marque de chaussures, Afro Shoes. " La marque reflète les différentes cultures de ce continent dynamique ", déclare-t-il, se reposant dans son studio au centre de la ville de Nairobi où deux de ses cordonniers coupent les tissus colorés et collent des semelles. Rugene est un grand partisan du développement de l'industrie de la chaussure africaine.

Rugene vend non seulement ses

Afro Shoes dans son pays d'origine, le Kenya, mais également depuis peu, en Tanzanie, au Rwanda, en Amérique, en Angleterre et en Allemagne. Les exporter est cependant un sacré défi. " Le transport des chaussures vers d'autres pays et d'autres continents est très cher ", déclare ce Kenyan longiligne avec ses dreadlocks et ses lunettes de soleil. " Trouver du personnel qualifié au Kenya a été une autre difficulté. Fabriquer des chaussures avec des tissus africains s'est avéré être une entreprise qui a suscité des polémiques parmi les cordonniers. C'est pourquoi ce fut un véritable combat pour trouver des cordonniers qui voulaient bien m'écouter et travailler avec moi ", nous explique-t-il tout en gloussant.

Rugene essaie d'utiliser des matériaux produits au niveau local autant que possible. " Nous mettons un point d'honneur à acheter des tissus qui ont été fabriqués en Afrique, comme au Mombasa, au Nigéria ou au Congo, puisque notre souhait est de soutenir l'économie africaine ". La Chine produit de plus en plus de tissus africains contrefaits et les exporte vers notre continent, cela devient de plus en plus un véritable défi.

De plus, le créateur n'étant pas en mesure de trouver des semelles produites localement, il doit les importer d'Allemagne. " Ce qui coûte très cher ", ajoute Rugene. Cela est également le cas pour les talons. " Un nombre de plus en plus important de femmes m'envoient des demandes pour que je fabrique des chaussures compensées à partir de tissus africains vifs et colorés pour leur mariage, mais il faudrait que j'importe les talons ", soupire-t-il. Rugene ne comprend pas pourquoi ses camarades kenyans ne sautent pas sur l'occasion. " Pourquoi est-ce que personne ne se lance dans la production de semelles ou de talons ? C'est sûr, il y a de la demande ". Selon le créateur, le gouvernement kenyan devrait stimuler l'industrie locale de production de textile et de chaussures.

Rugene est en contact avec la plupart de ses clients par le biais de son site Internet et de médias sociaux, puisque Afro Shoes n'a pas encore de boutique. " J'ai réellement l'intention d'ouvrir une boutique dans un proche avenir mais j'ai besoin de capitaux pour ça. "

De plus en plus d'imitation

Sa toute dernière collection de chaussures d' Afro Shoes propose moins de couleurs vives : les modèles Hession Afros sont faits à partir de toile de jute brune avec seulement quelques touches africaines de couleurs vives et les modèles Chelsea Boots sont même faits à partir d'un cuir brun. " Tout le monde n'aime pas les couleurs vives ", a remarqué le créateur kenyan. " Et bien que plus subtiles, ces chaussures te rendent toujours plus originales ", sourit-il. De plus, ses chaussures en cuir sont imperméables. " Je n'ai pas eu besoin de porter autant d'attention à la météo pour le marché kenyan mais ceci a changé depuis que je produis aussi pour les marchés européens et américains. "

En raison de la popularité des chaussures Afro Shoes, beaucoup de gens essayent d'imiter mes modèles de chaussures et de les vendre à un meilleur prix. Pour parer à cette situation, Rugene essaie également de maintenir ses prix bas (ses chaussures coûtent entre 25 et 45 euros). Il essaie également de lancer de nouveaux modèles aussi souvent que possible afin de devancer ses imitateurs. " Plus les personnes m'imitent, plus je dois travailler dur pour rester en tête de course. "

Images de Jeroen van Loon

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