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Du web à la grande distribution, le marché de la beauté noire fait sa révolution

  Mode & Beauté, #

Fini le temps où les femmes afro-caribéennes basées en France, n'avaient que Château Rouge ou Château d'Eau à Paris pour se fournir en produits cosmétiques.

Révolue également l'époque où elles se rassemblaient sur des forums, pour réaliser des achats groupés de cosmétiques sur des sites américains ou anglais.

En 2015, il suffit d'aller en grande distribution pour tomber sur des corners dédiés à la beauté noire et se rendre compte du boom actuel de ce marché.

Aujourd'hui démocratisé, le secteur de la beauté ethnique n'est pourtant pas dû à une prise de conscience collective de l'industrie cosmétique mais plutôt aux activistes et jeunes entreprises du web.

Comment Internet a changé la donne

" Auparavant, nous étions invisibles sur les médias classiques, alors nous nous sommes fait entendre sur les forums, les blogs et les réseaux sociaux.

Le rapport de force a changé, grâce au poids de la communauté afro en ligne ", explique Aurore Nayenka, fondatrice de l'institut Nayenka, pécialisé dans les beautés noires et métissées.

" Internet a changé la donne.

Les premiers forums comme Beauté d'Afrik ou Boucles et Coton ont été des espaces de partage pour les femmes qui rencontraient les mêmes problèmes et cherchaient des conseils ", confirme Fatou N'Diaye, une des premières françaises à promouvoir la beauté noire sur son blog Blackbeautybag créé en 2007.

" À l'époque, tout ce qui concernait la beauté noire n'était pas très développé en France.

On ne trouvait pas de conseils, ni en magasins, ni dans les magazines.

Du coup les forums étaient de véritables lieux d'échanges où chacune partageait ses expériences et ses galères.

C'était un peu comme appartenir à un mini-club privé entre filles, je pouvais y passer des heures ", raconte la blogueuse et femme d'affaires de 37 ans.

Juliette Smeralda, docteur en sociologie et enseignante, estime également qu'internet a joué un rôle crucial.

" Beaucoup de femmes se sont vraiment lâchées sur les forums et ont raconté leurs souffrances, que ce soit par rapport à des brûlures liées aux défrisage, des alopécies ou l'absence de produits adaptés en France.

" Espace autant cathartique que prescripteur, Internet a aussi aidé de nombreuses femmes à découvrir une facette de leur propre beauté et de leur identité.

 

Une nouvelle vision de la beauté noire

" Parler de beauté, c'est surtout parler d'image et d'estime de soi.

Suites aux stigmates de l'esclavage, nous sommes la seule communauté au monde à avoir rejeté, torturé et malmené notre cheveu avec le défrisage ou notre peau avec les produits éclaircissants.

Tout ça parce qu'on ne nous a pas appris à l'aimer " explique Aline Tacite, 41 ans, co-fondatrice du salon Boucles d'Ébène, dédié à l'industrie de la beauté noire et naturelle.

Dans son ouvrage Peau noire, cheveu crépu : l'histoire d'une aliénation paru en 2005, Juliette Smeralda dresse le même constat et explique les origines du " trauma ".

" Dès la parution de mon livre, j'ai enchaîné les conférences, salons et ateliers pour échanger avec les femmes sur leurs pratiques esthétiques et surtout pour leur donner de nouvelles perspectives, en termes de soins et d'entretien ".

 

 

 

 

Petit à petit, la femme noire a appris à se regarder dans le miroir

 

La multiplication des initiatives de valorisation de la beauté noire, a permis une prise de conscience collective et alimenté les débats sur les forums et blogs. Des webzines parisiens tels que Ghubar ou Fashizblack contribuent également à cette nouvelle vision de la beauté noire. " Petit à petit, la femme noire a appris à se regarder dans le miroir, à s'accepter telle qu'elle est, à s'aimer et à exploiter son patrimoine en créant de nouvelles coiffures et routines capillaires. Beaucoup d'entre elles ont fait preuve d'une créativité incroyable en partageant sur le net, leurs idées coiffures, mixtures et recettes faites maison ", s'enthousiasme Juliette Smeralda. " À l'époque, nous étions en train de redéfinir nos propres canons de beauté, aujourd'hui nous sommes en train de les imposer " se réjouit Aline Tacite.

Portés par cette prise de conscience et par une clientèle qui ne trouve pas des produits adaptés, de jeunes entrepreneurs noirs se lancent dans l'aventure et crée les premières marques françaises de cosmétiques ethniques ( Les Secrets de Loly, Nappy Queens, Noire au Naturelle etc...). Des sites de vente en ligne se lancent sur le créneau ( Belle Ébène, Diouda), des salons professionnels tels que Boucles d'Ébène ou la Natural Hair Academy s'organisent, des espaces beauté tels que Mix Beauty, Nayenka, Colorii, Ethnicia ou encore Inaya voient également le jour. Si certains acteurs du marché n'existent plus aujourd'hui, d'autres se sont imposés comme de véritables réseaux de distribution alternatifs, face aux poids lourds comme Sephora, Marionnaud ou Nocibé et face aux petits commerces traditionnels ethniques. " La société est diverse et le marché se doit de l'être également. On a autant besoin d'être représentés à la télé, que de trouver des produits qui répondent à nos besoins spécifiques ", clame le journaliste Harry Roselmack, qui a lancé sa marque de beauté Neoclaim en mai 2015.

 

 

 

Selon le cabinet D'Cap Research, le marché français de l'ethno-cosmétique représenterait 50 millions d'euros.
La femme afro-française consacre près de 1000 € à sa beauté, soit 4 fois plus que la femme caucasienne.
En 2014, elle a dépensé en moyenne 266 euros en maquillage (+ 6% par rapport à 2012) et 216 euros en produits capillaires (+10% par rapport à 2012. Source : agence de marketing ethnique AK-A.

En quelques années à peine, ce marché longtemps confidentiel est devenu un secteur concurrentiel comme les autres, avec l'entrée dans la danse, des grands groupes français. Depuis 2006, Franck Provost propose via son enseigne Niwel une offre de salon de coiffure haut de gamme pour les femmes noires et métissées. Les marques Mixa, Dop, ou Yves Rocher s'adaptent et proposent de plus en plus de produits formulés pour les femmes afro-caribéennes, métisses et maghrébines. Présent depuis plusieurs années sur ce marché via les marques Softsheen & Carson ou Mizani, le groupe L'Oréal Paris a fait une entrée fracassante sur le segment du cheveu naturel, en rachetant en 2014, la marque américaine Carol's Daughter, plébiscitée par les adeptes du retour au cheveu naturel.

Opportunisme commercial ou récupération : le débat divise

Aujourd'hui, centre de toutes les attentions de la part des grands acteurs de la cosmétique, le cœur de nombreuses femmes noires balance. " Oui, c'est de la récupération, mais c'est aux femmes de savoir si elles veulent donner leur argent à des grandes firmes, qui les ont négligées pendant longtemps, ou à des petites sociétés lancées par des entrepreneurs afro-descendants, qui se sont mis dès le départ au service de leur beauté ", rétorque Juliette Sméralda. " Lorsque l'on grandit en tant qu'ado dans une société qui ignore les besoins d'une partie de ses membres, cela reste quand même une grande avancée et une sorte de reconnaissance. Maintenant, c'est dommage que cela ait pris autant de temps ", concède Aline Tacite. De son côté, Aurore Nayenka trouve que le débat n'a pas lieu d'être. " En 2006, elles étaient frustrées qu'on ne s'intéresse pas à elles et maintenant elles parlent de récupération. Pour moi, c'est juste la loi du marché : une demande existe donc l'offre va se multiplier pour y répondre. " De sa propre expérience, Fatou N'diaye reconnaît que cette question fait débat.

 

 

 

 

Je ne suis pas la caution noire de L'Oréal

Depuis qu'elle collabore avec L'Oréal Paris en tant que consultante et ambassadrice, la bloggeuse doit faire face à ses détracteurs qui la traitent de " vendue ". " Je suis très contente d'incarner l'un des visages de L'Oréal, même si c'est une marque qui est très critiquée dans notre communauté. Pour autant, je ne suis pas la caution noire de L'Oréal, j'occupe un vrai rôle et travaille en synergie avec eux pour développer des choses qui vont dans le sens de la beauté noire ". De leur côté, les professionnels de la beauté s'accordent sur une réalité : leurs consommatrices sont beaucoup plus expertes et exigeantes que les autres. " Généralement ultra-connectées, ces femmes ont pris l'habitude de chercher elles-mêmes des infos et avis sur Internet. Elles veulent vraiment comprendre les produits qu'elles achètent et sont très exigeantes sur leur qualité et leur composition ", affirme Aurore Nayenka. Aline Tacite parle même de " psychologie de la femme afro-caribéenne avertie ".

 

Dans un tel contexte, le plus difficile pour les mastodontes de l'industrie cosmétique reste la communication. Tout l'enjeu pour elles est de réaliser une communication réussie, tout en restant crédible devant une communauté qu'elles ont ignorée des années durant. " Il faut que ces géants de l'industrie de la beauté arrivent à communiquer en disant " on vous comprend, on vous respecte et on vous propose quelque chose de juste, " analyse Didier Mandin de l' agence AK-A. Chef de projet à Diouda, Clarisse Libène attend de son côté une communication plus responsable. " J'ai grandi dans un monde où il n'y avait pas de représentation de la femme noire. Or, la publicité, le cinéma, la télé et même les poupées, participent à la construction de l'estime de soi, notamment au moment de l'enfance. Avec leur puissance de frappe, les grandes firmes de la beauté ont ce rôle à jouer. Avec leurs campagnes publicitaires et leur communication de marque, elles ont le pouvoir de changer la donne ".

 

Source : madame.lefigaro.fr


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Charlie
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