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Furcy Madeleine, l'esclave qui poursuivi son maître

  Société, #

De toutes les histoires de l'esclavage, il en est une qui se démarque singulièrement des autres. Réduit en esclavage à l'île Bourbon par d'étranges circonstances, Furcy Madeleine réussit à s'extirper des griffes de son maître et le poursuivit en justice. Il a gagné légalement sa liberté, et reçut même des indemnisations pour ses années de servitude.

La Traite des Noirs fut marquée par d'innombrables histoires d'atrocités, d'abus et d'exactions de toutes sortes. D'autres marquent de par le courage qui a porté certains individus à affronter de toutes leurs forces ce crime contre l'humanité que fut l'esclavage. L'histoire de Furcy Madeleine est de celles-là. Méconnu jusqu'à la parution du livre de Mohamed Aïssaoui à son sujet (" L'affaire de l'esclave Furcy ", Prix Renaudot 2010), Furcy Madeleine fut affranchi officiellement après 27 longues années d'âpres procédures judiciaire contre une justice coloniale implacable.

 

Né en 1786 à La Réunion d'une mère d'origine indienne, Furcy sera asservi de manière illégale, même pour les lois coloniales esclavagistes de l'époque. Sa mère, emmenée en France alors qu'elle était encore enfant, atterrit à l'île Bourbon (La Réunion) après avoir été confiée à une dame qui avait promis de la renvoyer en Inde. Elle n'est pas esclave, mais la famille qui la prend sous son aile la considérait comme telle. Son fils, Furcy, apprendra à lire et à écrire auprès de ses " maîtres ", et sera " acheté " plus tard par le gendre de la femme qui avait recueilli sa mère, un colon bourbonnais répondant au nom de M. Lory.

Apprenant en 1817 que sa mère était libre, il décide, avec le soutien du préfet de Bourbon, de faire appel à la justice. " Je me nomme Furcy. Je suis né libre dans la maison Routier, fils de Madeleine, Indienne libre, alors au service de cette famille. Je suis retenu à titre d'esclave chez M. Lory, gendre de Mme. Routier. Je réclame ma liberté. Voici mes papiers ", écrit-il aux autorités le 20 octobre 1817. Tous ses papiers et ceux concernant le procès ont été conservés. L'affaire fait grand bruit à l'époque, dans un contexte où le débat fait rage entre les abolitionnistes et les esclavagistes. Furcy est emprisonné sous un prétexte futile pour sa propre sécurité, puis envoyé à Maurice.

Après des premiers temps difficiles où ses conditions de vie ne sont guère meilleures qu'à Bourbon, Furcy obtient son émancipation de droit de la part des autorités anglaises. Il n'avait pas été déclaré à la douane lors de son débarquement. Déjà libre à Maurice, il alla jusqu'au bout pour faire reconnaitre sa liberté par les autorités françaises. Les procédures judiciaires continuent de plus belle à Bourbon, tandis que les colons grincent des dents. Désormais libre, Furcy se lance dans les affaires et ouvre une confiserie. Son enseigne était située non loin du théâtre à Port-Louis.

Les affaires marchant bien, Furcy s'achète des terres, et même des esclaves. Il est l'un des " libres de couleurs " les plus riches et célèbres de la colonie. Un premier jugement des autorités françaises reconnait sa liberté, mais la justice bourbonnaise minimise la faute de Lory, protégeant comme à l'accoutumée la réputation des colons. Il faudrait attendre que Furcy fasse appel à la justice parisienne pour enfin avoir droit à une réparation pécuniaire, après 27 années de procédures, en 1843.

Beaucoup ont vu dans le combat de Furcy Madeleine le procès de l'esclavage, Cependant, ce n'est pas le système esclavagiste qui fut remis en cause : Furcy demandait réparation contre une atteinte à ses droits. Il alla même jusqu'à posséder lui-même des esclaves. Néanmoins, le fait que le Code Noir fut opposé à la Déclaration des Droits de l'Homme durant le procès, conjugué à la persévérance inouïe de cet homme réduit en esclavage qui eut l'audace et l'intelligence de combattre ses oppresseurs avec leurs propres armes, font de l'histoire de Furcy Madeleine un récit hautement symbolique et passionnant.

Sur le sujet :

La question raciale et le " sol libre " de France : l'affaire Furcy, Sue Peabody, 2009.

 

L'affaire de l'esclave Furcy, Mohamed Aïssaoui, 2010 (Prix Renaudot).

La seconde affaire Furcy, Gilles Gérard, 2015.



Source : Cote Nord


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