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"Il y a 20 ans, on était dans un contexte d'afro-pessimisme"

  Société, #

 

Didier Acouetey participera au débat "Avoir 20 ans en Afrique" le samedi 10 octobre de 11h à 12h30 à la salle de conférence du stade de l'Amitié de Libreville. Inscription gratuite.

Pourquoi avoir décidé de créer un cabinet de recrutement africain ?

Il y a 20 ans, on ne parlait pas autant de l'Afrique en bien, on était dans un contexte afro-pessimiste. Et en même temps, on se rendait compte qu'on ne pouvait pas renverser cette dynamique si on ne remettait pas les hommes au cœur de cette transformation que tout le monde salue aujourd'hui. On s'est un peu inspiré de l'exemple d'autres pays, notamment de l'Asie du Sud-Est que l'on appelait "les Dragons" à l'époque. On s'est rendu compte que c'est parce qu'ils ont massivement misé sur la qualité des ressources humaines que les transformations ont pu s'opérer beaucoup plus vite. C'est comme cela que l'on s'est dit que la clé serait certainement d'encourager les Africains vivant à l'étranger à rentrer sur le continent. Nous avons donc créé le cabinet Africasearch pour répondre à ce besoin de compétences du continent africain et ainsi essayer de changer sa trajectoire.

 

La fuite des cerveaux est encore une réalité aujourd'hui ?

C'est une réalité, mais aujourd'hui elle est beaucoup plus massive sur les populations les moins diplômées. Cela n'empêche pas qu'on estime à 20 000 le nombre de cadres qui quittent l'Afrique chaque année. Il y a malheureusement toujours une fuite des cerveaux qui est due au fait que le marché africain ne créé pas assez d'emplois. Avant les gens partaient à cause des conflits politiques, aujourd'hui les gens partent surtout parce qu'il y a une masse de diplômés qui arrive sur le marché africain que l'économie n'arrive pas à absorber.

Ce problème d'emploi, c'est la conséquence d'une croissance non inclusive ?

C'est le problème d'une croissance qui est tirée par des secteurs qui n'emploient pas beaucoup de main-d'œuvre et qui ne créent pas assez d'emplois. Un secteur comme l'agriculture pourrait être très pourvoyeur d'emploi parce qu'il est encore peu moderne en Afrique mais si l'on regarde l'agriculture mondiale, l'agriculteur d'aujourd'hui est quelqu'un qui a fait des études, qui sait manipuler l'informatique. C'est une transition que l'Afrique n'a pas encore faite mais qui je pense va s'opérer dans les années qui viennent et cela pourrait créer un peu plus d'emplois. On estime quand même qu'il y a chaque année 14 millions d'Africains qui arrivent sur le marché du travail ce qui est énorme.

Quel regard portez-vous sur le système éducatif africain aujourd'hui ?

Il ne s'est pas beaucoup modernisé ces dernières années. Il souffre encore beaucoup d'une inadéquation entre ce qu'il offre et ce que le marché réclame. Il y a une surpopulation des universités en Afrique, ce qui fait que la qualité de l'enseignement n'est pas assurée, que les filières qui sont proposées ne répondent pas forcément aux demandes du marché et que très peu de personnes qualifiées sont intéressées par l'enseignement. En résumé, c'est un système éducatif qui est inadapté aux besoins des économies africaines et qui continue à former, malheureusement, beaucoup de chômeurs. De plus l'évolution des besoins se fait plutôt vers des profils plus techniques, des techniciens, des ingénieurs alors que 75% des Africains qui sortent du système éducatif viennent des Sciences Sociales. Heureusement, il y a le système éducatif privé mais il est cher. Les business schools aujourd'hui ont pris le relais de la faillite du système public mais on ne peut pas former que des managers, des commerciaux ou des banquiers, il faut aussi des profils techniques pour aborder la transformation du continent.

Selon vous à quoi ressemblera l'Afrique dans 20 ans ?

Si les tendances que nous observons se confirment, dans 20 ans, nous devrions avoir des économies beaucoup plus modernes et semi-industrialisées avec un système éducatif qui se sera adapté car il commence tout de même à faire sa mue. On peut aussi imaginer qu'il y aura beaucoup de jeunes entrepreneurs africains qui vont tirer la croissance et le marché de l'emploi vers le haut. Et puis, à mon avis, la classe politique sera certainement très rajeunie et je pense qu'elle comprendra mieux les enjeux du continent pour provoquer une forme de choc économique et socioculturel qui pourrait ressembler à celui que l'Asie du Sud-Est a connu. Mais cela suppose un leadership vraiment différent et une vision qui manque encore dans beaucoup de pays.



Source : www.liberation.fr


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