Quelle est l'origine de ces événements ?

Un taxi-moto musulman a été retrouvé mort dans le quartier de l'aéroport et transporté à la mosquée du quartier majoritairement musulman de PK5. Le bruit s'est répandu que l'assassinat avait été commis par des milices chrétiennes anti-balaka. Des manifestations ont alors éclaté. Des miliciens musulmans de l'ex-Séléka ont alors attaqué le quartier chrétien du 5e arrondissement. Une trentaine de personnes ont été tuées au hasard, une centaine blessées, des maisons et le commissariat ont été pillés, le temple protestant a été incendié. Le couvre-feu a alors été rétabli. " La réaction est disproportionnée, déplore Jean Willybiro-Sako, un ancien ministre joint par Le Point. On ne sait pas même pourquoi ce chauffeur est mort. "

Pourquoi la violence s'est-elle répandue dans la ville ?

De nombreux habitants sont spontanément descendus dans la rue avec des revendications disparates. Beaucoup réclament le désarmement des milices musulmanes à l'origine des troubles et le réarmement des Faca, les Forces armées centrafricaines ; d'autres demandent la démission de la présidente et de l'autorité de transition. La population proteste aussi contre la lenteur de l'intervention des casques bleus de la Minurca et de la force française Sangaris. Au début des émeutes, les soldats ont pris position autour des quartiers concernés sans intervenir directement. " La population s'est sentie abandonnée et la colère a explosé ", commente Jean Willybiro-Sako.

Qui sont les manifestants ?

On trouve des éléments extrémistes des deux camps, mais aussi beaucoup de citoyens excédés par le pourrissement de la situation. Il n'y a pas d'unité chez les manifestants. Des militaires ont demandé au président du Conseil national de transition (CNT) de renverser la présidente et de prendre le pouvoir, ce qu'il a refusé. Un mouvement citoyen pour l'appropriation de la destinée du pays est né dans le week-end, avec un leader de la société civile, Gervais Lakorisso, un artiste centrafricain. Ce mouvement ne réclame pas la démission de la présidente, mais le réarmement des Faca, le désarmement des milices musulmanes et le départ de Sangaris du pays.

Quelle est la situation ?

La tension reste vive à Bangui où des barricades ont été érigées un peu partout dans le centre-ville. L'aéroport était fermé lundi. Des ONG ont été attaquées lundi. Six manifestants auraient été tués près de la présidence de la République par des soldats burundais de la force des Nations unies. Mais ces dernières ont démenti avoir ouvert le feu. Un habitant du quartier nord de Bangui PK 12 joint par téléphone déclare voir arriver des miliciens anti-Balaka venus des autres régions du pays. " Les gendarmes de PK 12 ont fui, témoigne cet habitant. Les anti-Balaka se sont emparés de la caserne et s'organisent pour en découdre. Ils sont encadrés par des officiers de l'armée qui en ont assez de la situation. " Le quartier musulman de PK5 est encerclé par les anti-balaka et des soldats. Les Français commenceraient à être regroupés par la force Sangaris. La prison de Bangui a été abandonnée par ses gardiens et environ 800 prisonniers se sont échappés. Des sources concordantes évoquent désormais une cinquantaine de morts depuis samedi. La société civile appelle à un défilé ce mercredi dans le centre de la capitale. Une manifestation à haut risque. Les autorités ainsi que les leaders musulmans et chrétiens ont appelé au calme.

Le processus issu du Forum de Bangui est-il remis en cause ?

Le 4 octobre doit théoriquement se tenir un référendum pour approuver la nouvelle Constitution du pays. " Ça sera difficile de respecter le calendrier, déplore Jean Willybiro-Sako. On voit mal comment les élections pourront avoir lieu d'ici la fin de l'année. Certains n'ont toujours pas de cartes d'électeur et la situation se dégrade. "