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Le rap, du ghetto au préau

  Musique, #

Paul Valéry, Colette ou John Steinbeck... Quelques grands noms auxquels ont dû se frotter les bacheliers à l'épreuve de français en 2013. D'ici quelques années, ils pourraient se retrouver face à des textes écrits par Lunatic, Jay-Z ou encore Kery James.

 

Des rappeurs à la place des écrivains classiques ? L'idée n'est pas si folle selon Valérie Morel, inspectrice en éducation musicale de l'académie de Versailles : " En musique, il n'y a jamais eu de rap au bac. Mais en 2013, il y avait du Pink Floyd, du Jimi Hendrix. Donc pourquoi pas ? " Avant même qu'un texte soit proposé à l'examen rituel, une nouvelle génération d'enseignants s'est déjà engouffrée dans la brèche. Ils se servent du rap pour enseigner dans leurs salles de classe.

A Maurepas (Yvelines), Emilie Henot utilise ce levier au collège Alexandre-Dumas. " La majorité des programmes sont basés sur "une culture classique", mais une partie des élèves, souvent issus des quartiers, ne s'y intéressent pas. Ils n'y voient pas d'intérêt ", constate l'enseignante d'histoire-géographie. Un sentiment partagé par Youssoupha, disque de platine avec son dernier album Noir Désir. D'ailleurs, le rappeur n'y va pas par quatre chemins, en se demandant à haute voix : " Comment leur dire que les poèmes d'Apollinaire ont moins de verve que "Demain c'est loin" ? "

" MONTRER QUE LA CULTURE EST PARTOUT "

Emilie Henot a donc décidé, dans le cadre de son cours d'éducation civique, de briser les codes. Pour parler discrimination, au programme des élèves de 5 e, elle a utilisé la chanson " Banlieusards " de Kery James, manifeste d'une jeunesse qui n'est " pas condamnée à l'échec ". " Il ne suffit pas de chanter, "Regarde comme ils nous malmènent" / Il faut que tu apprennes, que tu comprennes et que t'entreprennes ", scande l'artiste qui s'est produit devant 12 000 personnes à Bercy en novembre 2013. Pour Karim Hammou, sociologue spécialiste du rap, la question n'est pas de savoir s'il faut utiliser le rap en classe mais " quelles chansons sont étudiées et pour quel type d'enseignement ".

 

Le choix de ce titre qui prône le refus de l'immobilisme n'est pas anodin. Pas plus que celui de son interprète. " J'ai choisi une chanson de Kery James car je voulais un texte avec un vocabulaire correct, ce qui limite sérieusement les choix possibles ", glisse Émilie Henot.

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Pour l'enseignante, l'objectif était double, d'un côté " donner une motivation à tous ceux qui depuis longtemps n'en ont aucune " et de l'autre " montrer que la culture est partout, que le rap en fait partie au même titre que la littérature classique ".

Dans les rangs, la proposition n'a pas fait que des heureux. " Les élèves les plus scolaires ont un peu fait la tête au départ à l'idée de travailler sur du rap, surtout les filles. " Passée la première réaction, la plupart des collégiens se sont pris au jeu, même les moins travailleurs.

" IL N'Y A AUCUNE HIÉRARCHIE DES STYLES MUSICAUX "

Un peu comme le rappeur havrais Tiers Monde, en son temps. Ce membre du label Din Records, dont l'un des leitmotivs est " Le savoir est une arme ", a gardé en mémoire le nom de l'un de ses professeurs. " M. Gomes nous avait ramené des textes d'IAM à l'école, se souvient-il. Et là, tout de suite, j'ai été à fond dedans ! " Ce souvenir marquant lui fait dire que " l'école devrait amener les jeunes vers des choses qui les intéressent et pas l'inverse ".

 

Pour quelques précurseurs, la présence du genre à l'école ne serait pas si récente. Auteur d' Une Histoire du rap en France (La Découverte, 2012), Karim Hammou estime que " dès le milieu des années 1990, des documents pédagogiques reprenant certaines paroles de chansons de rap existaient dans le milieu éducatif ".

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Ce qui a changé, c'est le rapport des enseignants, et même de l'inspection, à cette musique qui accompagne l'enfance des jeunes générations. Ainsi, Valérie Morel accueille avec plaisir les projets liés au rap. " Au collège et au lycée, nous abordons le rap comme le jazz, le rock ou la musique classique. Il n'y a aucune hiérarchie des styles musicaux. "

Il ne lui viendrait même pas à l'idée d'interroger " la légitimité du rap à l'école vis-à-vis de Mozart ". Et les textes violents, parfois vulgaires ? " On en trouve dans n'importe quel style d'oeuvre, c'est le rôle du professeur d'expliquer le texte. C'est pareil avec le rap. "

En 2012, pour la première fois, un rappeur faisait son entrée dans un manuel d'histoire. Le texte 17 octobre de Médine a été utilisé par l'éditeur Nathan pour illustrer la guerre d'Algérie à destination d'élèves de terminale. Une vraie reconnaissance.



Source : campus.lemonde.fr


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