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Le sculpteur béninois Kifouli Dossou renonce au prix Orisha

  Culture & Loisirs, #

Il est des entreprises qui semblent maudites dès leur conception. Le prix Orisha, lancé en 2014 par la collectionneuse béninoise Nathalie Miltat et Timothée Chaillou, codirecteur artistique de la foire Akaa, est de celles-là. Plus que maudite, mal emmanchée, tant l'opération trahit un certain amateurisme.

L'idée était pourtant vertueuse : offrir tous les deux ans une récompense d'une valeur de 10 000 euros à un artiste du continent africain, assortie de deux expositions. Un soupçon de collusion, relevé par les membres du comité de sélection, avait toutefois terni le lancement. L'artiste béninois primé, Kifouli Dossou, avait été présenté par Marie-Cécile Zinsou, dont le père, Lionel Zinsou, l'actuel premier ministre du Bénin, est un actionnaire influent de la maison de ventes Piasa qui accueillait la soirée...

Si le prix Orisha fait de nouveau parler de lui, c'est que le lauréat a finalement décidé d'y renoncer, après avoir constaté un dysfonctionnement dans ses modalités. Sur le site Internet, il est ainsi spécifié que " le prix permet au lauréat de bénéficier d'une dotation financière de 10 000 euros lui servant à la production d'œuvres pour deux expositions personnelles ". Sauf qu'au final la somme est affectée non à la production d'œuvres mais à l'organisation des expositions prévues dans l'espace créé par le marchand Bob Vallois à Cotonou et à la galerie Patricia Dorfmann à Paris.

Les prix des œuvres réévalués à la baisse

L'artiste a donc payé de sa poche la production des œuvres sans avoir vu la couleur de ces 10 000 euros. " J'aurais dû écrire d'emblée que la somme était dédiée aux expositions, c'était mal rédigé ", admet Nathalie Miltat. " La dotation sert à mettre en place la logistique, le transport, les frais de montage, de vernissage, la scénographie que réalise Bruno Peinado à Paris, ajoute Timothée Chaillou. Nous voulions être bienveillants, sinon on aurait fait les choses plus simplement et on aurait donné 10 000 euros. Là on a trouvé des galeries, on a fait un travail qui fait sens. "

" Bienveillant ", il n'est pas sûr que Kifouli Dosso apprécie cette formule paternaliste. Il n'a pas plus aimé que les prix qu'il avait proposés pour ses œuvres aient été réévalués à la baisse par les organisateurs. Plus encore, c'est la formulation du contrat qui a fait bondir son ami l'artiste Romuald Hazoumé, bon connaisseur des arcanes du marché. Dans un courriel rageur, ce dernier renvoie les organisateurs du prix dans leurs cordes, en les plaçant dans " la longue liste de ceux qui n'ont rien à faire avec les artistes africains ".

Le contrat adressé à Kifouli Dosso est, il est vrai, insensé. La galerie peut ainsi consentir une remise jusqu'à 20 % à ses clients sans l'accord préalable de l'artiste. Elle s'autorise aussi à acheter les œuvres avec un abattement de 25 % sur le prix de vente client, après soustraction des frais. Le dépôt des œuvres est consenti pour une durée de six mois, alors même que l'exposition à la galerie Patricia Dorfmann était prévue du 28 novembre au 9 janvier.

" Un contrat très bancal "

Plus étrange, le prix Orisha se réserve le droit de retourner les œuvres invendues avant le terme de cette période, alors que l'artiste, lui, ne peut les reprendre dans ce délai. " Ce contrat est très bancal, constate un grand galeriste parisien à qui nous l'avons montré. Les engagements qu'on exige de l'artiste sont beaucoup plus conséquents que ceux demandés au galeriste. "

Artiste française basée au Bénin et chargée par les organisateurs d'Orisha du transport des œuvres de Kifouli Dossou, Céline Coyac, ne décolère pas : " Dans cette ébauche de contrat, il y a des clauses qui révèlent soit une extrême incompétence, soit une manipulation. " Penchons plutôt pour l'impéritie. Nathalie Miltat, qui est visiblement mal entourée, reconnaît avoir monté le contrat à partir de modèles glanés sur Internet, sans le moindre conseil juridique. " Ce n'était qu'une ébauche, j'étais attentive à toutes les observations. Je suis prête à écouter, se défend-elle. Quand j'ai créé ce prix, j'y suis allée avec les moyens du bord, avec mes maladresses sans doute, mais en aucun cas avec mauvaise foi. "

Celle-ci se déclare prête à prendre en charge la production qu'a assumée Kifouli Dossou. Trop tard semble-t-il. L'artiste a récupéré les œuvres qui devaient être transportées le 9 novembre vers Paris et s'en est retourné dans sa ville de Covè...



Source : www.lemonde.fr


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