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“Le zouk est passé de mode” ? Qu'importe, Kassav continue de remplir des stades

  Musique, #

Le zouk se porte bien, merci pour lui. “On n’a même jamais autant déplacé de monde” affirme le leader du groupe antillais. Analyse du phénomène qui dure avant sa série de concerts en France.

 

N’en déplaise à tous ceux qui pensaient que la hit music des années 1990 avait fait long feu, cramée par le soleil trop vahiné des tropiques et autres préjugés « doudouistes ». « Les médias ne parlent plus de nous, mais on sort des disques et on joue encore devant des milliers de personnes. On n’a même jamais autant déplacé de monde depuis que le zouk est soi-disant passé de mode », nargue à 60 ans Jacob Desvarieux, le leader de Kassav. Près de quarante ans après ses flamboyants débuts, le groupe qui inventa le zouk et propagea la musique de ce corps à corps chaloupé explosif dans le monde entier continue de remplir des Zéniths et des stades en Afrique et en Europe. Y compris en France, leur « plus petit marché », où ces inusables pionniers ont rempli le Stade de France en 2009 (ils furent aussi le premier groupe français à y jouer) et joueront encore ce week-end trois fois d’affilée au Zénith de Paris, leur salle fétiche (cinquante concerts au total, tous complets), devant un public chaud bouillant d’Antillais de la diaspora, mais aussi de métropolitains férus de groove tropical.

Et ils ne sont pas les seuls… d’autres formations pionnières de la musique antillaise moderne continuent de surfer sur cette vague créole et guincheuse qui transforma le traditionnel bal à papa insulaire en guinche sans frontières : des vétérans de légende comme Exile One ou les sémillants Vikings de la Guadeloupe, précurseurs du zouk, qui se reforment aujourd’hui et assureront la première partie de Kassav au Zénith. En Martinique, il y a d’abord la Perfecta, qui ambiançait encore récemment les cabarets chics de Martinique : le combo mythique, né en 1970, a implosé l’été dernier suite au départ de son chanteur historique, Paulo Albin, mais ce dernier prévoit déjà de reformer un all stars avec ses anciens comparses. Il y a aussi Malavoi, groupe presque cinquantenaire et roi d’un biguine moderne, ouvert aux vents caribéens, qui reviendra en tournée notamment à l’automne. Petit tour d’horizon de ces « institutions » antillaises qui continuent de faire tanguer les foules.

Kassav

Non, Kassav, ce n’est pas la Compagnie créole : pas le genre à faire rire les petits oiseaux, mais plutôt celui à secouer les cocotiers, en créole, évidemment, avec un groove qui met le feu et rend le live explosif. Et ça fait trente-sept ans que ça dure… Le chanteur Patrick Saint-Eloi est mort en 2010, mais les autres sont tous encore là, tels les fondateurs en 1979, Jacob Desvarieux, Pierre-Edouard Décimus et Freddy Marshall, ou l’indispensable Jocelyne Beroard… Ce sont eux, jeunes musiciens biberonnés au gwoka traditionnel, au compas haïtien et au calypso trinidadien, branchés sur les ondes radiophoniques de la salsa, mais aussi du rock et de la bossa, qui ont inventé le zouk, tambouille caribéenne cuivrée additionnée de claviers, aux fortes velléités identitaires. Héritiers des orchestres de jazz et de béguine de Pointe-à-Pitre, ils avaient alors la volonté de créer un groove caribéen universel. Depuis, ils ont ambiancé des Zéniths à la pelle, dont une cinquantaine de fois à Paris. Pour cet « ultime » passage, annoncent-ils, l’orchestre rejouera, comme un écho à son âge d’or, tout le répertoire de son premier Zénith, en 1986, avec des titres comme le cultissime Zouk la sé sel médikaman nou ni, qui pourrait être le titre manifeste du genre. Dernier zouk à Paris ? Bien sûr que non. « Dans trois ans, on aura quarante ans, on trouvera bien un lieu pour fêter ça… », fanfaronne Jacob Desvarieux.

 

Malavoi

Avec Malavoi, les Antilles sortent les violons et jouent la carte du grandiose, mais dans l’esprit populaire des bals martiniquais des années soixante. A l’origine ? Une bande de musiciens amateurs qui ambiançaient les guinches de Fort-de-France en reprenant les classiques du kompa haïtien et qui, en 1969, se dotèrent d’une section de cordes pour moderniser biguines, mazurkas et bel-airs antillais. Depuis, l’orchestre martiniquais, dont le nom évoque une variété de canne à sucre, a rempli, comme Kassav, toutes les grandes salles de la métropole. Moins rock que son voisin guadeloupéen, plus variété, Malavoi donne dans le quadrille et la valse, mais se frotte aussi au zouk, notamment sous l’influence des jeunes musiciens qui ont intégré ses rangs _ en quatre décennies, le groupe a vu passer une centaine de musiciens. C’est encore plus flagrant sur leur nouvel album, Oliwon, qui accueille des invités comme Valérie Louri et Loriane Zacharie.

Longévité du groupe oblige, certains des anciens ont disparu (Paul Rosine, directeur musical et figure tutélaire, en 1993, puis Jean Paul Soïme, Christian de Negri…), jusqu’au manager historique, Henri Valide, il y a quelques jours à peine. Mais l’archet de Mano Césaire (le neveu du poète) est toujours vaillant. Et Malavoi peut toujours compter sur ses chanteurs historiques, Tony Chasseur et les deux crooners Ralph Thamar et Pipo Gertrude, pour roucouler sur les vieux antillais métissés et les violonades sucrées qui continuent de faire leur succès.

 

 

 

Les Vikings de la Guadeloupe

Ce n’est par un hasard si Pierre-Edouard Décimus a d’abord été un Viking avant d’être un Kassav : formés en 1966, les impétueux Vikings de la Guadeloupe servirent de laboratoire aux futurs inventeurs du zouk. Car, en brassant leurs traditions insulaires (bèlè, biguine et rythmes au tambour) aux danses latines des îles voisines (salsa, merengue, calypso), ces jeunes rockeurs antillais habités par l’esprit frondeur des yéyés réinventèrent le concept même d’orchestre de bal, à coups de guitares funky et de cuivres New Orleans. Leur syncrétisme créole fit école en Guadeloupe (quelque 200 musiciens sont passés par l’orchestre) et séduisit du même coup le public de métropole, où ils furent les premiers Antillais à connaître le succès. Leur heure de gloire, toutefois, ne dura qu’une douzaine d’années : à la naissance de Kassav en 1979, les Vikings, beaux joueurs, mirent leurs guitares jazz-funk en sourdine pour laisser la place au zouk, le « futur de la musique » (dixit Miles Davis). Mais les voilà repartis à l’abordage, cinquante ans après leur naissance, avec un best-of (Enkor On Ti Tou, 1966-2016) et une prochaine tournée : quelques vétérans du groupe (Guy Jacquet, Max Severin, Fred Aucagos, Hippomène Leauva) se sont reformés autour du saxophoniste Camille Sopran’n, cofondateur du groupe. Gageons que nos sémillants rockeurs, complétés par quelques jeunes recrues, sauront groover avec la même insolence.

 


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jack
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