Devenez publicateur / Créez votre blog


 

Les artistes africains méritent plus de visibilité

  Culture & Loisirs, #

Julie Taylor est née au Zimbabwe mais c'est à Johannesburg qu'elle a lancé (et autofinancé) son entreprise, en mars 2014. La galerie d'art en ligne Guns & Rain a emprunté son nom au titre du livre de l'anthropologue David Lan qui évoquait la guérilla et les médiums pendant la lutte pour l'indépendance du Zimbabwe. Une façon de dire que choisir et " curater " une œuvre d'art est à la lisière de la culture et de quelque chose de plus spirituel. Et que faire reconnaître les artistes au niveau international est un combat quotidien.

Pour le moment, la galerie compte dix artistes, la plupart sud-africains (avec une Botswanaise, deux Zimbabwéens et un Namibien), qui travaillent principalement la peinture, le dessin, les collages. Les prix sont abordables, de 200 à 900 dollars. Julie Taylor gère seule la galerie, avec " un réseau de collaborateurs, conseillers et mentors dans le domaine de l'art, des nouvelles technologies et de la communication ".

Ancienne de chez Google Afrique, elle a notamment participé au lancement du Google Art project en 2011 qui propose en ligne plus de 32 000 oeuvres issues des collections de 46 musées à travers le monde. Guns & Rain a été le premier portfolio consacré à l'art contemporain issu d'Afrique à apparaître sur la Google Open Gallery. Entretien.

Quels sont vos critères de sélection pour choisir les artistes représentés par la galerie ?

Je cherche des artistes qui sont vraiment engagés dans leur travail et qui ont une trajectoire prometteuse. Certains se sont fait remarquer localement, ont participé à des résidences, nationales ou internationales, mais ne sont pas encore représentés par une galerie. Leur travail doit résonner en moi. Les thèmes qui m'intéressent sont la nature, la culture, l'identité, la terre, la lutte et le changement, entre autres - et cela influe sur la sélection et le commissariat des œuvres pour Guns & Rain.

La plupart des artistes de Guns & Rain sont jeunes et émergents. Beaucoup d'entre eux sont issus de milieux défavorisés, donc en plus d'acquérir des œuvres d'art de grande qualité, les collectionneurs peuvent investir dans le fait de développer la capacité d'autonomie financière des artistes et dans une forme de philanthropie. Dans certains cas, comme celui du Zimbabwéen Richard Witikani, les artistes sont déjà bien établis mais n'ont pas encore atteint la visibilité internationale qu'ils méritent.

 

Aviez-vous une expérience dans la vente d'œuvres d'art avant de monter votre galerie en ligne ?

Non. Je suis anthropologue de formation et, récemment, j'étais à la tête du service communication de Google pour l'Afrique. Mais j'ai toujours été passionnée par l'art. Ces dernières années, je me suis rendu compte que je passais la plupart de mon temps libre à écumer les galeries et les ventes aux enchères.

" En 2008, j'ai aussi été témoin des conditions de vie très difficiles des artistes de mon pays d'origine, le Zimbabwe "

En 2008, j'ai aussi été témoin des conditions de vie très difficiles des artistes de mon pays d'origine, le Zimbabwe. J'ai alors commencé à réfléchir à la façon dont internet pouvait les aider à obtenir une meilleure reconnaissance de leur travail par les acheteurs internationaux. Guns & Rain est une entreprise mais j'attache une grande importance au social, qui inclut à la fois l'artiste et le développement d'un public. Cette année, en plus de me former à l'entreprenariat, je vais aussi retourner à l'école pour passer un diplôme en Histoire de l'Art !

En tant que galeriste, quels sont les avantages et les inconvénients d'être uniquement en ligne ?

 

Aux États-Unis, un sondage de UGallery, publié en 2014, montre que les gens pensent qu'acheter de l'art est plus effrayant que d'acheter une voiture. Grâce à Internet, l'art est maintenant beaucoup plus accessible qu'avant, notamment en termes d'accès à l'information concernant le marché. Les gens sont souvent plus enclins à visiter une galerie ou un musée en ligne plutôt " qu'en vrai " car ces espaces peuvent parfois être un peu intimidants.

La forte demande mondiale pour le numérique, en particulier chez les moins de 40 ans, a également créé de nouvelles façons de découvrir et d'acheter de l'art. Les nouvelles technologies conduisent à une démocratisation importante du monde de l'art. Ce sont les avantages. Maintenant, vendre de l'art est bien sûr très différent de vendre une paire de chaussures ou un logiciel. Acheter une œuvre implique une prise de décision nuancée, subjective et émotionnelle. Le principal défi est d'utiliser au mieux l'environnement virtuel online pour vendre une œuvre de qualité. Il faut du temps pour comprendre comment les personnes interagissent avec l'art en ligne et répondre alors au mieux à leurs besoins et à leurs intérêts.

" Les nouvelles technologies conduisent à une démocratisation importante du monde de l'art "

Faites-vous la promotion de " vos " artistes au public et aux collectionneurs, en Afrique du Sud et à l'étranger ?

Oui car, malgré une récente explosion de l'intérêt international pour l'art contemporain africain dans le monde " hors ligne ", les artistes africains sont encore largement sous-représentés en ligne. Guns & Rain comble ce fossé et apporte une représentation réfléchie, intelligente, abordable et accessible de cet art.

Promouvoir l'art contemporain réalisé en Afrique est beaucoup plus facile avec les outils Internet et les médias sociaux même si les relations traditionnelles hors ligne, avec les collectionneurs - existants et potentiels -, d'autres marchands et les galeristes, demeurent importantes.

Quel est le profil de vos acheteurs ?

 

Ils viennent pour la plupart des États-Unis, de Grande-Bretagne, du Canada, d'Australie et d'Allemagne mais le trafic sur le site fait état de dizaines d'autres pays. J'ai aussi une clientèle de plus en plus importante en Afrique du sud. De nombreux acheteurs sont de jeunes professionnels qui font avec nous leur premier investissement dans l'art.

Vous avez travaillé 7 ans pour Google Afrique. La firme américaine est souvent perçue comme " le grand méchant loup " qui veut imposer ses vues en Afrique. Ne pensez-vous pas que les Africains doivent créer leurs propres outils numériques ?

Cette perception est moins importante sur le continent qu'en Europe ou qu'aux États-Unis, d'abord parce que l'utilisation d'Internet est moins enracinée, avec un accès relativement limité et coûteux, ensuite parce que les préoccupations politiques sont différentes. Google a beaucoup investi dans l'écosystème technologique du continent, notamment en apportant une assistance non négligeable aux développeurs web.

" Des sociétés comme Google peuvent jouer un rôle de facilitation et de soutien, qui n'est pas forcément en contradiction avec le fait que les Africains créent leurs outils et leurs technologies "

En 2011, une application de divertissement appelée Afrinolly a remporté une petite somme d'argent lors du premier Concours pour développeurs Android de Google en Afrique. Cela a permis à l'équipe de passer à l'étape supérieure et, aujourd'hui, l'application a été téléchargée plus de quatre millions de fois à travers des dizaines de pays.

Autre exemple, la plateforme à succès Africa Check, innovante et à but non lucratif, qui fait de la vérification d'informations pour promouvoir la précision dans le débat public et les médias. Africa Check a été développé après que le concept ait gagné un prix lors de la première édition de l'Africa News Innovation Challenge, financé par Google, Omidyar et d'autres dans le cadre des efforts visant à favoriser l'innovation numérique dans les médias africains. Je pense que des sociétés comme Google peuvent jouer un rôle de facilitation et de soutien, qui n'est pas forcément en contradiction avec le fait que les Africains créent leurs outils et leurs technologies. Tous les jours, ceux-ci en créent de nouveaux.

Quels développements pour Guns and Rain en 2015 ?

Plus d'artistes et d'œuvres sur la plateforme, notamment venus d'Afrique du Sud, de Namibie et du Zimbabwe. Il y a aussi des collaborations avec des partenaires à l'international qui sont prévues. Pour avoir votre dose régulière d'art contemporain africain, vous pouvez nous suivre sur les réseaux sociaux.

 


lemonde.fr


PARTAGEZ UN LIEN OU ECRIVEZ UN ARTICLE

Pas de commentaire

Pas de commentaire
 
abdelaziz.assani
Partagé par : abdelaziz....@France
Communications et Marketing, Stratégie et Développement d'Entreprises. Consulting, collaborations...
VOIR SON BLOG 185 SUIVRE SES PUBLICATIONS LUI ECRIRE

SES STATS

185
Publications

27930
J'aime Facebook sur ses publications

542
Commentaires sur ses publications

Devenez publicateur

Dernières Actualités

Pas d'article dans la liste.