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Matières premières : chronique d'un " pillage systématique "

  Société, #

Mêlant investigations, rencontres et reportages, The Looting Machine (La Machine à piller, sorti en anglais le mois dernier), est un livre minutieusement documenté. Il est le fruit des années de correspondance en Afrique de Tom Burgis, enquêteur au Financial Times.

Le pillage des ressources naturelles en Afrique est-il aussi " systématique " que vous l'affirmez ?

Effectivement. Pendant près de vingt ans, les économistes ont diagnostiqué une " malédiction des matières premières ", un paradoxe par lequel les nations les plus riches en ressources naturelles souffrent souvent d'une grande pauvreté, d'une mauvaise gouvernance et de conflits. Pendant les années où j'ai vécu en Afrique, ce qui m'a frappé est que même si c'était sûrement vrai, ce n'était pas un accident, pas une bizarrerie de l'économie. C'était un système de pillage organisé.

Comment cela fonctionne-il ?

Au cœur de cette machine à piller se trouve l'abus d'une fonction publique à des fins privées. Quand des compagnies comme Royal Dutch Shell et KBR (une ancienne filiale du groupe parapétrolier américain Halliburton) soudoient des fonctionnaires africains, ils sapent le pacte de base de l'Etat - à savoir que les titulaires de fonctions publiques œuvrent pour l'intérêt général.

Les pillards ne sont donc pas seulement des dirigeants africains ?

Les classes dirigeantes africaines sont certainement coupables dans de nombreux cas, mais ce sont surtout des réseaux transnationaux branchés sur l'économie mondiale qui servent leurs propres intérêts. Les alliés de ces classes dirigeantes comprennent des multinationales qui remportent des contrats pétroliers et miniers en partenariat avec des sociétés écrans détenues par les autorités locales, ainsi que des entreprises du système bancaire international qui les aident à déplacer leur fortune personnelle à l'étranger.

Le rôle d'institutions financières mondiales comme la Banque mondiale apparaît aussi controversé...

De nombreux Africains ont ressenti les souffrances que les industries extractives leur ont infligées. Comme ces déversements de cyanure au Ghana, ces mauvaises conditions de travail qui ont conduit aux horreurs à Marikana en Afrique du Sud, cette dictature financée par le pétrole au Tchad. Mais la Banque mondiale a soutenu des projets mis en cause dans ces trois exemples. Quand une étude de leurs propres services a suggéré il y a une dizaine d'années que les industries pétrolières et minières pourraient accroître la pauvreté, les responsables de la banque l'ont largement ignoré.

La machine à piller va-t-elle tomber en panne un jour ?

Aujourd'hui, des pays comme le Nigeria dépendent du pétrole pour près de 70 % de leurs revenus, et seulement 4 % de leurs recettes proviennent des impôts prélevés sur les contribuables. Donc, les gouvernants ne se sentent pas redevables à l'égard des gouvernés. Leur jeu est de capturer des rentes liées aux ressources. Une économie plus diversifiée s'appuyant sur un plus grand secteur manufacturier permettrait d'avoir davantage d'emplois formels, et donc plus de contribuables pour financer l'État et obliger le gouvernement à rendre des comptes.

Retrouvez la version longue de cette interview sur le blog du Monde Ressources africaines



Source : www.lemonde.fr


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