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NOIR (NWA): Fournier-Désiré, chaud tandem

  Culture & Loisirs, #

Le projet NOIR (NWA) n'a pas été de tout repos pour le cinéaste Yves Christian Fournier et le scénariste Jean-Hervé Désiré, qui signe son premier long métrage. Ils nous racontent leurs difficultés, mais aussi leur rencontre qui, espèrent-ils, inspirera d'autres projets du genre.

 

On sent en entrevue que la dynamique entre Yves Christian Fournier et Jean-Hervé Désiré est à la fois stimulante et exigeante. Ils ne sont pas d'accord sur tout, en premier lieu sur le titre du film, qui est une prise de position: NOIR ( NWA, traduit en créole) cible clairement une communauté qui a souvent été égratignée dans les médias.

Pour Désiré, la proposition originale était plus radicale, inspirée d'un slam qu'il avait écrit. " NOIR devait être un acronyme, comme le film C.R.A.Z.Y., et signifiait Nègre Organisé Intelligent et Radical", explique le scénariste, dont la passion et l'engagement dans sa démarche ne sont pas sans rappeler un Spike Lee. D'ailleurs, son projet au départ était très ambitieux, 150 pages de scénario soumises à la productrice Nicole Robert, de nombreux personnages, et la volonté de faire un Gomorra haïtiano-québécois.

Mais il a fallu revoir à la baisse les espérances. Entre autres parce que le budget a été réduit, et ainsi les jours de tournage: seulement 26 jours pour un film complexe qui suit les destins de quatre jeunes dans un ghetto. "On a décidé de centrer l'histoire sur quatre personnages et de faire du ghetto un cinquième personnage, note le scénariste. Est-ce un trou noir qui les aspire ou peuvent-ils sortir du bocal? Certains trouvent des solutions, et d'autres sont attirés par le lifestyle des gangs de rue."

Yves Christian Fournier l'avoue, il a été sérieusement échaudé ces dernières années par les institutions, et c'est ce qui explique sa longue absence après le superbe Tout est parfait, qui a séduit la critique en 2008. Il a dû laisser tomber son deuxième projet, un audacieux film d'anticipation écrit par Jonathan Harnois, qui a essuyé de multiples refus et poussé Fournier à faire une sortie publique contre la SODEC en 2012.

"Honnêtement, mon prochain film, j'ai envie de le tourner aux États-Unis, dit-il. La sagesse m'aurait dit de reporter d'un an le tournage de NOIR, mais ce temps-là, on me l'a volé. J'avais une urgence de tourner, même si la situation était plus corsée. Je ne voulais pas recommencer toute l'histoire des institutions."

Le fantôme de Villanueva

N'empêche, une fois le projet sur les rails, les obstacles ont été nombreux et Yves Christian Fournier reconnaît qu'il aime les choses compliquées. Peu de moyens, des comédiens débutants, des lieux de tournage pas évidents dans des HLM...

"J'ai pensé plusieurs fois laisser tomber le projet, j'avais peur de ne pas y arriver. Je suis content de l'avoir fait, vraiment, mais c'était risqué. On aurait aimé avoir plus de temps, on se serait plus parlé, Jean-Hervé et moi, on aurait cherché encore plus de vérité et d'inspiration dans le moment présent. Mais je dirais qu'au Québec, stick to the plan, parce que sinon, ça dérape."

Malgré les frictions, Désiré et Fournier forment un beau tandem. Il est intéressant que le scénario ait été écrit par Désiré qui connaît de l'intérieur la réalité à montrer, et que cette réalité ait été filmée par Fournier. Bien sûr, certains déploreront qu'on parle encore des gangs de rue lorsqu'il est question des Noirs.

"Je voulais prendre le temps d'aller voir la nuance derrière les stéréotypes, note Désiré. Avec ce qui s'est passé dans l'affaire Villanueva, je pense qu'au Québec, il était temps de faire un film sur ces gens et, stéréotypes ou pas, je savais à quoi je m'attaquais. Notre rôle n'est pas de changer les mentalités, mais d'ouvrir un dialogue. Mon scénario s'inscrit dans un cinéma social, mes maîtres à penser sont les Dardenne, Ken Loach, Mike Leigh. Mes personnages auraient pu être d'une autre couleur, ça aurait pu se passer dans une cité française, ce sont au final des histoires universelles."

"Je me suis rendu compte que j'avais bourlingué dans plein de pays, mais que je n'avais jamais marché dans les rues de Montréal-Nord, raconte Fournier, ex-participant de La course destination monde. Quand je me promenais dans le quartier pour faire du repérage, les gens venaient me voir et me demandaient: c'est un film sur Villanueva? C'est ça qu'ils voulaient! J'avais une responsabilité de l'inclure d'une certaine manière. D'ailleurs, on voit dans le film l'endroit où il est mort."

Alors que le film est sur le point de sortir sur les écrans, les embûches ne sont malheureusement pas terminées. NOIR (NWA) ne prendra l'affiche que dans quelques salles à Montréal. "Encore aujourd'hui, on me dit que le film n'aurait pas dû se faire parce que ça parle de Noirs et que personne ne va aller le voir, déplore le cinéaste. Ou que le profilage racial est un mythe. On me condamne à être ignoré. Je ne veux pas accuser les compagnies de distribution, mais il y a une espèce de pensée qu'en région, il n'y a aucun intérêt pour ce qui se passe à Montréal."

"Ou que les Noirs ne vont pas au cinéma", renchérit Désiré avec un sourire ironique. "C'est faux de dire que ce film n'est pas en phase avec la réalité, car il y a plein d'endroits où on n'a pas pu tourner parce que ce que nous filmions était trop proche de la réalité, conclut Fournier. Il faut voir ce film comme le début d'une chaîne de films. On va finir par arriver à quelque chose."

 


Source : www.lapresse.ca


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elsa
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