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Pam Grier dans les années 70
Si l'on retourne un peu en arrière, on observe que les personnages féminins noirs des films des années 70 étaient très souvent des prostituées ou des femmes manipulatrices, n'hésitant pas à utiliser le sexe pour arriver à leurs fins. Leur sexualité était alors décrite comme déjantée, presque animale. a l'inverse nos héroïnes d'aujourd'hui sont conscientes de leur quotient sexuel et l'utilise en réponse à leurs émotions complexes. Aucune d'entre elles peut être qualifiée de dépravée, leur sexualité est étroitement liée à la nature de leurs relations amoureuses Shonda Rhimes, à la rescousse ?
Annalise Keating, Miranda Bailey et Olivia Pope
De l'image de la femme hyper-sexualisée, soumise au contrôle de l'homme à celle de la femme indépendante, en plein contrôle de sa sexualité, l'industrie de la télévision a su rectifier le coche. L'arrivée de Shonda Rhimes et de ses séries Grey's Anatomy, Scandal et récemment How To Get Away From Murder ont donné une certaine modernité au paysage féminin télévisuel. Voire même une autre lecture. En choisissant Kerry Washington pour le rôle d'Olivia Pope, Shonda Rhimes entre dans l'histoire. En effet, Scandal devient, lors de sa diffusion, la première série d'une chaîne nationale à avoir dans un rôle principal une femme afro-américaine. Et cela depuis trois décennies. On peut affirmer que la condition de femme noire de Shonda Rhimes résonne dans le profil de certains de ses personnages. Que ce soit avec Olivia Pope ( Scandal), Miranda Bailey ( Chandra Wilson; Grey's Anatomy), Annalise Keating ( Viola Davis; How To Get Away From Murder), elles sont toutes indépendantes, carriéristes et financièrement stable. Elles surpassent donc les stéréotypes attachés à la femme noire. Cependant, elles se révèlent aussi fragiles et complexes. Olivia Pope, entre raison et passionEn effet, si les scènes de sexe entre Olivia Pope et le président Grant sont si nombreuses, c'est qu'elles traduisent de l'intensité de leur complexe relation. Olivia est partagée entre son désir d'entretenir une relation passionnée avec l'homme qu'elle aime, et la raison qui la pousse à passer à autre chose. Si on observe les scènes précédant les scènes de sexe, on voit que les deux personnages sont souvent en confrontation ou se retrouvent devant un dilemme. Ayant pour seule certitude d'être fous amoureux l'un de l'autre, ils se précipitent dans le seul schéma certain: le sexe. Olivia sait qu'il n'y a aucune issue mais ne sait comment se détacher physiquement de Grant. Sa relation avec Jake Ballard lui permet de s'évader de son paradis infernal et de retrouver un semblant de normalité. Mais jusqu'à quand ? Mary Jane: une sexualité imprégnée de désespoir ?A cette liste d'héroïnes, on ne peut oublier Mary Jane, de la série Being Mary Jane, diffusée sur la chaîne câblée BET. Interprétée par Gabrielle Union, elle entre parfaitement dans ce nouveau profil de la femme noire à la télévision. Femme de pouvoir dans ses relations professionnelles, elle ne parvient pas à trouver une stabilité dans ses relations amoureuses. A la recherche de l'amour et du vrai, ses relations ne se finissent jamais bien (homme marié, homme pas prêt l'engagement, etc...). Par conséquent, elle se relaie dans des solutions de facilité. Sa sexualité se résume dans un premier temps à la masturbation. Puis non satisfaite, elle acquiert un sex-friend qui n'a pour seul but de combler le vide laissé par ces précédentes relations. Leur relation, basée sur une simple activité sexuelle, ne fait que renforcer le cercle vicieux de Mary Jane. Son désespoir l'empêche de trouver les vraies solutions à son problème. Cookie: une sexualité actualiséeRécemment apparue sur les écrans, le personnage de Cookie dans Empire ( Taraji P. Henson) démonte encore une fois les stéréotypes attachés à l'image de la femme noire. Si Lee Daniels l'a écrite forte, sexy, sans langue de bois et maternelle, Cookie reste une entité à part entière. Mère de trois enfants issus de sa relation avec Lucious, son expérience avec ce dernier constitue le noyau principal de sa sexualité. Voilà sans doute pourquoi la tension sexuelle entre les deux est aussi forte. Mais cela change quand arrive le beau et jeune Malcom Deveaux ( Derek Luke). Même si elle initie le rapprochement physique, elle est surprise de constater que tous les hommes ne sont pas comme Lucious. Cette relation, bien que courte, lui permet d'agrandir le spectre de sa sexualité. Même si, en réfléchissant, on ne sait pas vraiment ce qu'il s'est passé durant ces 17 années en prison... Peut-on aller plus loin ?A l'époque, les séries Sex & The City et Desperate Housewives furent parmi les premières à célébrer la libération de la femme, que ce soit professionnellement, émotionnellement ou sexuellement. Desperate Housewives présenta d'ailleurs son premier personnage principal féminin noir avec Renee Perry, dans la saison 7. Interprété par Vanessa Williams, elle élargit le spectre féminin de la série. La diffusion de toutes ces séries ont permis aux spectatrices de la communauté noire de se sentir enfin inclus dans la représentation de la sexualité féminine. Malgré ces avancés, on peut pousser le débat avec cette question: à quand l'arrivée d'un personnage principal féminin noir lesbien ou bisexuel? La série The L World proposait déjà un casting comprenant deux femmes noires: Kit Porter ( Pam Grier) et Tasha Williams ( Rose Rollins). On jouait déjà sur leur sexualité et leur préférence sexuelle. Aujourd'hui, Orange Is The New Black continue de montrer la variété de la sexualité féminine avec les personnages de Taystee ( Danielle Brooks), Crazy Eyes ( Uzo Aduba) et Sophia Burset ( Laverne Cox). Cependant, ces séries proviennent de chaînes câblées ou à la demande (Showtime, Netflix). Peut-on espérer voir des chaînes comme Fox, ABC ou NBC suivre le mouvement?
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