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Spark : L'innovation scolaire frugale en Afrique du Sud

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Ecoles privées low cost

Les bonnes idées d'entrepreneurs sud-africains pour l'éducation du plus grand nombre

The Economist

En MBA, beaucoup d'étudiants rêvent de faire fortune. Stacey Brewer rêvait de transformer l'enseignement scolaire. Elle craignait que le système scolaire d'Afrique du Sud reproduise les ségrégations raciales, avec son système à deux vitesses composé d'écoles publiques de piètre qualité pour la majorité noire, et d'écoles privées d'élite pour, principalement, la minorité blanche. Sa thèse de MBA à la business school GIBS de Johanesbourg, en 2011, exposait le plan directeur d'une chaîne d'écoles privées qui adopterait les méthodes courantes de gestion d'entreprises (comme les économies d'échelle et l'innovation technologique) pour proposer un enseignement privé à prix bas aux masses. La chaîne Spark gère aujourd'hui quatre écoles et en ouvrira quatre autres en 2016.

 

Tout dans l'école Spark de Bramled, un quartier mixte de Johanesbourg, parle d'aspirations. Les élèves sont d'origines différentes, environ 80?% sont noirs, les autres sont blancs ou "de couleur", pour reprendre le mot hideux utilisé en Afrique du Sud pour désigner les métisses, mais tous portent des uniformes pimpants. L'école a un vague parfum d'école privée classique?: l'accent est mis sur la formation du caractère et la discipline. Mais elle utilise aussi des méthodes moins classiques comme le chant et la danse. Les élèves commencent leur journée en récitant une profession de foi qui comprend la phrase?: "Je suis élève de Spark et je vais aller à l'université."

"Une chaîne d'écoles privées qui adopterait les méthodes courantes de gestion d'entreprises (comme les économies d'échelle et l'innovation technologique) pour proposer un enseignement privé à prix bas aux masses"

Spark a la ferme intention de fournir une éducation en établissement privé à un coût moindre que les 18?000 rand (1?200?dollars USD) que coûte par an un élève dans une école publique. Ces écoles se spécialisent dans le "blended learning", l'enseignement mixte par professeurs et ordinateur?: les élèves passent une partie des heures de classe dans des cours classiques et le reste dans une salle informatique où ils complètent leurs leçons sur un écran. Les écoles font des économies en étant locataires, en regroupant l'administration, en demandant aux parents de participer à l'entretien et en rémunérant moins les enseignants que dans une école publique.

Mme?Brewer et son associé, Ryan Harrison, lui aussi diplômé de GIBS, ont ratissé le monde à la recherche d'idées. Ils ont calqué Spark sur le modèle des écoles Rocketship en Californie, une chaîne d'écoles sous gestion privée.

Ils mesureront les progrès des élèves de Spark en comparant leurs résultats avec ceux des meilleurs élèves du monde par matière?: les élèves britanniques pour l'anglais et les écoliers de Singapour pour les mathématiques. Ils sont convaincus que les nouvelles technologies permettront à la chaîne de grandir bien plus vite que cela n'était possible dans l'enseignement auparavant?: les professeurs peuvent partager le matériel pédagogique en ligne, leurs supporters peuvent construire la marque de l'école sur les réseaux sociaux.

L'obligation de résultats

L'Afrique du Sud a connu une augmentation fulgurante du nombre de ces écoles privées low cost depuis la fin de l'apartheid, explique Ann Bernstein, du think tank Centre for Development and Enterprise. Le pays dépense un généreux 6,2?% de son PIB pour l'éducation. Mais les résultats sont consternants?: par exemple, pour 100 élèves scolarisés depuis 2003, 48 ont présenté l'examen final de fin d'études secondaires (le "matric"), 36 l'ont réussi et 14 sont entrés dans l'enseignement supérieur. Une explication de cette situation est l'absence d'obligation de résultats. Les professeurs des écoles publiques comptent parmi les mieux payés au monde en termes de parité de pouvoir d'achat selon la Commission de planification nationale. Mais des salaires de départ élevés et des syndicats forts signifient qu'il est impossible de les récompenser s'ils travaillent bien ou de les licencier s'ils travaillent mal. "Vous faites ce que vous voulez et vous êtes quand même payé" dit un enseignant qui souhaite rester anonyme. "Parfois, vous mourrez, et vous continuez à toucher votre salaire."

"Le pays dépense un généreux 6,2?% de son PIB pour l'éducation. Mais les résultats sont consternants?: par exemple, pour 100 élèves scolarisés depuis 2003, 48 ont présenté l'examen final de fin d'études secondaires (le "matric"), 36 l'ont réussi et 14 sont entrés dans l'enseignement supérieur"

Les premières écoles privées low cost étaient improvisées, elles ouvraient dans des usines abandonnées et autres des immeubles désaffectés. Aujourd'hui, une poignée de chaînes d'écoles font fructifier capitaux et sophistication. Elles se répartissent en trois groupes. Dans le premier, des écoles appartenant à des groupes cotés en bourse, comme AdvTech et Curro. Actuellement, AdvTech se positionne dans le segment des écoles chères, mais souhaite se développer sur les écoles low cost, comme les chaînes d'hôtels qui se diversifient avec des enseignes d'hôtels 'budget'. Curro n'a été lancé qu'en 2011 mais compte déjà 42 établissements. Dans le deuxième groupe, on trouve les écoles qui appartiennent à des sociétés privées non cotées en bourse mais commerciales, comme Spark et d'autres groupes similaires. Le troisième groupe, et le plus important, est celui des écoles à but non lucratif, connues en Afrique du Sud sous le nom d'"écoles indépendantes". Elles font payer des frais de scolarité mais reçoivent également des subventions du gouvernement. Beaucoup de ces établissements ont opéré sans aucun contrôle pendant des années. Le BASA Educational Institute Trust a été fondé par un groupe d'entrepreneurs noirs en 1993. Il a trouvé récemment des capitaux pour financer son expansion auprès de banques telles que Old Mutual et du Fonds des retraites des fonctionnaires.

Au-delà de "juste rester en vie"

Tout le monde n'admire pas pour autant les beaux discours sur la pédagogie collaborative et le levier des nouvelles technologies.

Helene Ulster enseigne depuis vingt ans à l'école United Church School, une école indépendante. L'école est située à Yeoville, un quartier bien plus dur que Bramley où se trouve l'école Spark.

Les élèves doivent franchir deux portails en fer pour y entrer. À l'extérieur, des dealers vendent du "dagga" (cannabis). Plus de la moitié de ces enfants sont des immigrés des pays africains voisins. L'assistante sociale de l'école dépiste fréquemment des traces de violences et d'abus sexuels. Mme?Ulster s'amuse du discours sur la magie de la technologie. Même si l'école pouvait se permettre d'acheter des iPads, dit-elle, ils seraient volés en un clin d'œil s'ils restaient sur les lieux. Selon elle, il n'existe pas assez de dirigeants d'écoles charismatiques et d'enseignants motivés pour créer des chaînes d'écoles privées qui marchent?: "Rester en vie est déjà assez compliqué."

"Il n'existe pas assez de dirigeants d'écoles charismatiques et d'enseignants motivés pour créer des chaînes d'écoles privées qui marchent?: "Rester en vie est déjà assez compliqué.""

Un tel scepticisme est salutaire, étant donné l'hyperbole qui règne habituellement autour des initiatives en matière d'éducation. Mais l'enseignement privé en Afrique du Sud a de belles perspectives. Il est moins développé qu'en Inde, où 40?% des élèves en milieu urbain fréquentent un établissement privé, ou au Punjab, au Pakistan, où l'État fournit des "bons d'éducation" pour régler les frais de scolarité tant dans des écoles privées que publiques. Au Pakistan, les écoles privées sont vues comme une solution pour soulager le système de l'éducation nationale qui explose.

Entre?2000 et?2010, le nombre d'écoles publiques en Afrique du Sud a diminué de 9?%, alors que le nombre d'écoles indépendantes a augmenté de 44?% (mais elles partaient d'un chiffre beaucoup plus bas). Elles peuvent aussi faire office de laboratoires pour de nouvelles idées?: les écoles BASA utilisent les nouvelles technologies en classe, y compris dans les établissements situés dans des quartiers aussi durs que Yeoville. Mais la chose la plus importante que pourraient réussir des écoles comme Spark, c'est d'encourager davantage d'enfants sud-africains à avoir des aspirations et qu'elles ne soient plus réservées aux seuls rejetons de l'élite.

© 2015 The Economist Newspaper Limited. All rights reserved. Source The Economist, traduction Le nouvel Economiste, publié sous licence. L'article en version originale?: www.economist.com.



Source : www.lenouveleconomiste.fr


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